05/11/2015
Exposition Cerisier-Montpied à Carquefou, aux Renaudières
Nous voici Jean-Louis Cerisier et moi à nouveau réunis¹, cette fois aux Renaudières, cet espace culturel que la municipalité de Carquefou (ville située dans la grande périphérie de Nantes), sous la direction de Chantal Giteau, voue généreusement depuis plusieurs années, entre autres, à la découverte de divers artistes de la mouvance dite "singulière". L'exposition qui commence le 14 novembre prochain est prévue pour se clore le 13 décembre.
Bruno Montpied, Nid de nuit, 32 x 25 cm, 2004
Nous présentons chacun une quarantaine d'œuvres dans l'espace de trois salles dont la dernière tentera de faire cohabiter nos deux systèmes de représentation. Si Cerisier pour sa part montre des œuvres qui furent choisies par Chantal Giteau dans une de ses récentes périodes où le thème dominant est la "maison" (voir ci-contre La fugue, huile sur toile, 38 x 46 cm, 2015) je présente de mon côté des œuvres de petit format (la plus grande fait 30 x 43 cm ), réalisées pour la plupart d'entre elles selon une technique qui mixe l'encre, la mine de plomb, des solutions acryliques, des crayons de couleur et autres marqueurs. Deux œuvres ont été le fruit d'un travail à deux, tantôt avec Sasha Vlad en Californie (nous avons travaillé par échange postal de la même œuvre, un collage proposé par lui et interprété graphiquement par moi, ; voir ci-dessous), tantôt avec Petra Simkova (Chansons d'ivrognes, œuvre réalisée en simultané). Quatre autres œuvres font partie des "modifications" que j'exécute régulièrement depuis des années en repeignant ou en redessinant par-dessus des reproductions photographiques de cartes postales, magazines, gravures, etc. Plusieurs autres œuvres que j'exposerai à Carquefou ont été précédemment montrées cet été dans la Creuse à la Maison du Tailleu. Il y a bien sûr aussi plusieurs autres nouveaux venus.
Bruno Montpied et Sasha Vlad, Le Monument et son gardien effaré, 30 x 23 cm, technique mixte sur papier, 2010
Bruno Montpied, Le message, gravure modifiée à l'encre, au stylo et aux crayons de couleur, 29 x 20 cm, 2010
Un petit catalogue d'une trentaine de pages, avec neuf reproductions pour chaque artiste, a été prévu par les Renaudières pour être diffusé le jour du vernissage (semble-t-il). Ce sera aussi l'occasion pour moi de vendre quelques exemplaires de mon récent livre "Andrée Acézat, oublier le passé", ainsi que des exemplaires de l'autre titre paru dans la collection La Petite Brute, "Visionnaires de Taïwan" de Remy Ricordeau. Bienvenue à tous ceux qui pourront se retrouver par là-bas, près de Nantes.
Bruno Montpied, La Grande Dame et l'homme qui a perdu la tête, encre, mine de plomb, lavis et marqueurs sur carton d'emballage alimentaire, diamètre 19 cm, 2015
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¹ La première fois, Cerisier et moi fûmes réunis par Pascal Rigeade à Bègles au musée de la Création franche en février-mars 2011.
10:27 Publié dans Art naïf, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bruno montpied, les renaudières, carquefou, chantal giteau, jean-louis cerisier, art singulier, art naïf, création franche, art collectif, modifications, sasha vlad, petra simkova, andrée acézat, visionnaires de taïwan | Imprimer
31/10/2015
Dubuffet, Freinet, Chaissac, une causerie au Musée de la Création Franche à leur sujet
Le Musée de la Création Franche annonce une causerie prochaine de Vincent Rousseau qui aura lieu le 5 novembre à 19h à la bibliothèque municipale de Bègles qui jouxte le musée. Cette animation s'inscrit dans un cycle qui s'intitule "le Grand Partage de la Création Franche".
Dessins à la craie par des enfants (7-8 ans) dans une cour d'école sur une barrière percée de trous...
M. Rousseau a fait toute sa carrière au Musée des Beaux-Arts de Nantes où il fut conservateur des collections d'art moderne et créateur du service éducatif, nous dit-on. C'est ce qui explique sans doute qu'il ait été intrigué par les liens qui ont uni Jean Dubuffet avec Elise et Célestin Freinet qui vivaient à Vence en même temps que lui dans les années 50-60 (ils y avaient installé une école expérimentale, où l'imprimerie pouvait être pratiquée de façon simple par les élèves). Dubuffet les connaissait depuis 1948, puisque nous dit le service de presse, il avait acquis du matériel de gravure sur linoléum afin de l'expédier à son nouvel ami Gaston Chaissac. Ce dernier en venant visiter Dubuffet en 1956 chercha à rencontrer aussi les Freinet. Cela paraît cohérent, quand on sait le goût qu'avait Chaissac pour tous ceux qui cherchaient à propager la créativité dans les classes populaires (ce qui l'inclinait à se désigner comme "artiste rustique moderne" au lieu d'auteur d'art brut, étiquette que certains lui collent encore aujourd'hui de façon approximative ; on sait également qu'il peignit avec des enfants).
Vue de l'intérieur du musée d'art enfantin de Coursegoules, extraite d'une brochure d'Elise Freinet
Vincent Rousseau devrait évoquer au cours de sa causerie le soutien qu'apporta Dubuffet en 1962 aux deux Freinet (surtout Elise) lorsque ceux-ci cherchèrent à fonder un musée d'art enfantin à Coursegoules dans les Alpes-Maritimes (aujourd'hui fermé semble-t-il, quoiqu'une fresque en bas-relief intitulée De la bête à l'homme de 5 m x 3 m, réalisée par des enfants, existe toujours sur une façade du village). Le conférencier, ancien conservateur au musée des Beaux-Arts de Nantes où il monta en 2010 une exposition-dossier sur les liens Dubuffet-Chaissac-Freinet, qui rappelait l'expo internationale d'art enfantin tenue à Nantes à l'initiative de l'école Freinet en 1957, connaît donc bien le sujet, qui n'a pas à ma connaissance été beaucoup défriché par d'autres.
Gaston Chaissac, graffiti dans les latrines de l'ancienne école de Ste-Florence-de-l'Oie (Vendée), ph. Bruno Montpied, 2012 ; latrines classées monuments historiques
Tous renseignements supplémentaires: 05 56 85 81 73
14:06 Publié dans Art de l'enfance, Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dubuffet, chaissac, vincent rousseau, elise et célestin freinet, école nouvelle, musée d'art enfantin de coursegoules, le grand partage de la création franche, musée de la création franche, art enfantin | Imprimer
29/10/2015
Radio-Libertaire rencontre la Petite Brute
Cela fait longtemps que je n'avais pas pondu une petite note sur ce blog. C'est qu'il y avait de l'occupation ces temps derniers. Une foire d'art brut avec beaucoup "d'apparentés", dits aussi "outsiders", où moi et mon autre auteur de livres pour la Petite Brute, présentions et dédicacions nos ouvrages respectifs, "Visionnaires de Taïwan" (Remy Ricordeau) et "Andrée Acézat, oublier le passé" sur le seuil de l'espace "hors-les-murs" de la Halle St-Pierre. Pour ceux qui s'en inquiéteraient cela s'est passé gentiment. Quelques aficionados étaient au rendez-vous, ayant bravement franchi les cerbères qui réclamaient l'habituel droit de péage exorbitant (15€ ; les visiteurs de la FIAC, non VIP, payaient eux au même moment 35€, m'a-t-on dit... Autant dire que les gueux n'étaient pas invités à ces réjouissances ; du reste les prix, à l'Outsider Art Fair - je n'ose évoquer ceux de la FIAC -, dépassaient toutes les possibilités des bourses plates. Paraît que des Robillard - un peu clinquants, un peu trop bien ficelés dans le genre "brut" - s'envolaient pour aller atterrir chez James Brett (surnommé méchamment par certains habitués de la foire "le prédateur") pour 15 000 €... C'est vrai cette rumeur? Et Robillard dans tout ça?
J'y reviendrai... Ou non. Tous mes efforts se tournent en ce moment vers la Petite Brute. On (moi et Ricordeau) va (allons) demain matin (jeudi 29 octobre à 11h ; l'émission sera ensuite podcastable et téléchargeable à cette adresse, mais attention... elle dure deux heures et nous n'intervenons qu'à partir du début de la deuxième heure) sur Radio Libertaire (la radio sans dieu ni maître et sans publicité) dans l'émission "Chroniques Hebdo" de Gérard Jan pour en causer. Si vous lisez cette note avant cette échéance, précipitez-vous... Et si vous n'avez rien de mieux à faire bien sûr. C'est seulement dans quelques heures. Sinon, ça peut se réécouter, même de loin je pense, grâce à la magie d'internet.
Deuxième titre de la collection La Petite Brute, avec en annexes des témoignages de Jean Corrèze et d'Alain Garret, une lettre de Gérard Sendrey... 76 pages, 52 illustrations, 15€...
J'y pense, mon petit livre sur Andrée Acézat n'est pas encore en librairie, hormis à celle de la Halle St-Pierre qui en possède déjà quelques exemplaires de retour de la foire d'art brut (avec beaucoup d'apparentés). La mise en place en librairie (par le diffuseur Les Belles Lettres) est prévue pour la mi novembre. Qu'on se le dise...
Andrée Acézat, tableau au titre et aux dimensions non renseignés, 1999 (exposition "Comédies humaines" au Forum des arts et de la culture à Talence en 2010)
00:03 Publié dans Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : la petite brute, andrée acézat, bruno montpied, outsider art fair, andré robillard, radio-libertaire | Imprimer
27/09/2015
Marcel Vinsard déterritorialisé à Lyon
Du 28 septembre (demain lundi) au 16 octobre prochain, quelqu'un a eu l'idée de proposer à Marcel Vinsard, l'ex-coiffeur auteur d'un jardin habité d'un millier de sculptures taillées principalement dans le polystyrène qu'il peint ensuite de couleurs vives, dont j'ai déjà parlé sur ce blog, de présenter plusieurs de ses sculptures à Lyon dans une MJC. Cela s'inscrit probablement dans le cadre de la prochaine Biennale Hors-les-Normes qui régulièrement (tous les deux ans donc) présente dans plusieurs locaux éclatés un peu partout dans la ville des expos, conférences et autres projections ou manifestations diverses sur le thème des arts bruts et apparentés ("outsiders" pour parler comme les Américains). Si j'ai le temps, je tacherai d'y revenir, car d'autres expos cette année là-bas méritent qu'on en parle et peut-être aussi qu'on s'y transporte.
Marcel Vinsard lisant studieusement un ouvrage d'art, ph. Bruno Montpied, 2013
Marcel Vinsard est un cas à part parmi les créateurs d'environnements. Moi qui n'aime pas trop employer le terme d'artistes à tort et à travers en évoquant les auteurs populaires de jardins naïfs et fantastiques, puisqu'ils ne sont pas des professionnels de l'art, n'en vivant pas, ne se situant pas par rapport à ce qui se fait dans le spectacle et l'histoire de l'art, participant d'une culture autre, relevant en fait de la culture de masse (télé, bd, pubs, media) où surnagent parfois des bribes des anciennes traditions rurales, avec Vinsard, je dois reconnaître que ce recordman de la quantité de statues installées dans un jardin entre habitat et route aime à se confronter à certains artistes reconnus. Il l'annonce sur des divers panneaux autour de sa maison, chez lui, on trouvera du Braque, du Picasso (voir ci-dessous une "poupée" d'après Picasso), du Giacometti, des Uriburu (qui est nettement moins connu celui-ci) qu'il expose comme des articles destinés à prouver la dextérité de son insolite artisanat. Il ne fait pas que ça, loin de là, puisqu'il en était en décembre dernier à 1000 pièces, mais il ne dédaigne pas de se laisser photographier en train de feuilleter un livre d'art, l'air de rien...
Le voici donc extrait de son jardin de Pontcharra en Isère, ses œuvres légères du fait de leur matériau à la fois ductile et peu dense le permettant tout à fait, et le suggérant même, même si ce ne fut pas le mobile premier de leur réalisation. Lorsque je l'ai visité en 2013, il avait des difficultés à donner un prix possible devant mon désir d'acquérir une de ses pièces. Qu'en sera-t-il à la MJC de Monplaisir (la bien nommée)?
Cependant, que voici un drôle d'artiste, que j'aimerais bien voir au milieu des cénacles de rapins lyonnais. Il y aurait des chances que, toutes proportions gardées bien entendu (faut pas exagérer en effet), ce genre de réunion risquerait de tourner en eau de boudin, du genre banquet du Bateau-Lavoir avec Picasso (justement) recevant le Douanier Rousseau, avec peut-être quelques malentendus à la clé...
Marcel Vinsard, De Gaulle perdu dans la foule des "modèles" de l'ex-coiffeur, ph. et coll. BM, 2013
Exposition Marcel Vinsard, MJC Monplaisir, 25, ave des Frères Lumières, Lyon 8e ardt, tél: 04 72 78 05 75. Gratuit, ouv tlj de 9h à 21h.
17:17 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : marcel vinsard, environnements spontanés, art sans artistes, mjc monplaisir, biennale hors-les-normes de lyon 2015, picasso, uriburu, culture de masse, giacometti, de gaulle | Imprimer
22/09/2015
Découverte de Claudie Gousset, dessinatrice en couleur
Gousset, c'est un nom qui me fait songer... Et si c'était le gousset où le lapin poursuivi par l'Alice de Lewis Carroll remet sans cesse sa montre?
Claudie Gousset, sans titre, 30 x 40 cm, crayons et feutres, sans date
Elle habite dans la région bordelaise, elle dessine depuis fort longtemps, me dit-elle, mais elle s'est contentée jusqu'à ces dernières années d'exposer ses œuvres dans l'espace réservé du cercle familial. Elle peut recourir au noir et blanc, mais ce qu'elle préfère avant tout, c'est nager avec délectation dans la couleur. Elle paraît cultivée, elle fit des études littéraires liées au monde germanique, elle a été bibliothécaire.
Deux autres œuvres aux crayons, feutres et à la gouache, sans titre sans date
Dans les œuvres que l'on peut découvrir sur son site web, je préfère personnellement les œuvres narratives. Elle dessine en effet aussi, en dehors de ces dernières, des œuvres où l'ornemental revendique de prendre beaucoup de place. On sent des influences dans son travail, par moments on voit un Wolfli pointer le bout de son nez dans une de ses compositions. Elle avoue être allée au musée de la Création Franche, y avoir admiré les travaux de Claudine Goux (ça commence en plus comme son nom, Goux...sset), ou ceux de Gilles Manero. Son travail en tout cas est sensible, et me paraît prometteur. A suivre donc.
Claudie Gousset, 40 x 30 cm, feutres, crayons, gouache, sans titre, sans date
00:07 Publié dans Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : claudie gousset, artistes bordelais, création franche, ornementation, gilles manero, art singulier | Imprimer
16/09/2015
Sortie prochaine de mon livre sur Andrée Acézat dans la collection La Petite Brute et exposition d'hommage à Lino Sartori à Talence
Concordance des temps non concertée, il se trouve qu'a débuté (le 8 septembre) au Forum des Arts et de la Culture de Talence une exposition d'hommage à Lino Sartori (semble-t-il vu à travers l'œuvre de la peintre et dessinatrice Cyrille-Marie Brachet), intitulée "Arbres" et prévue pour se terminer le 8 octobre, alors qu'à la mi novembre (en librairie) devrait être prêt chez l'imprimeur le deuxième titre¹ d'une nouvelle collection consacrée aux arts de l'immédiat, La Petite Brute, que dirige votre serviteur, ouvrage qui est consacré à celle qui fut l'épouse de Lino Sartori, j'ai nommé Andrée Acézat (1922-2009).
Acézat, peintre de genre, un nu, coll. Christophe Vermis
Et puis tout à coup, tout bascule... la même Acézat, Le Dépit, 80 x 60 cm, 2000, coll. privée région bordelaise, une toute autre manière de peindre... ph Bruno Montpied
Le livre, intitulé Andrée Acézat, oublier le passé, édité par l'Insomniaque (même éditeur que pour mon précédent livre Eloge des Jardins Anarchiques), au sein d'une étude retraçant ce que j'ai pu glaner et rassembler autour de la vie et de l'œuvre atypique de cette artiste bordelaise, ayant rompu avec sa formation académique autour de ses 70 ans pour se lancer dans un long cortège de caricatures tendant à métamorphoser ses modèles pris dans la réalité en enfants grotesques et pathétiques, ce livre évoque aussi de ci de là la figure de son mari Lino, qui sous l'influence de sa femme, se mit à son tour à pratiquer peinture en deux dimensions, et surtout en trois car il affectionnait particulièrement la peinture sur souches de bois.
A consulter ci-dessous le papillon annonçant officiellement la sortie du livre et l'adresse où on peut dès maintenant le commander. Pour ceux qui préfèrent voir le bébé tangiblement, il sera chez le diffuseur les Belles Lettres aux alentours du 15 novembre, de même qu'est prévue d'ores et déjà une signature par les deux auteurs des deux premiers titres (BM et Remy Ricordeau) s'insérant dans une nouvelle collection de monographies sur les arts de l'immédiat, intitulée La Petite Brute. Ce sera sur le stand de la Halle Saint-Pierre, le 24 octobre en milieu d'après-midi, au salon d'art outsider (Outsider Art Fair) de l'Hôtel du Duc, rue de la Michodière dans le IXe ardt. La diffusion en librairie se mettra alors en place à partir de ces dates. Deux autres titres sont d'ores et déjà écrits, programmés pour le semestre suivant de l'année 2016 (respectivement sur les épouvantails de Denise et Pierre-Maurice Chalvet-Gladine, en Aubrac, et le site "aux mille modèles" de Marcel Vinsard en Isère).
Logo de la collection La Petite Brute, chez L'Insomniaque, dessiné par BM (d'après un dessin original de 2012, de 24 x 18 cm, intitulé Cuisse de nymphe part en vadrouille)
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¹ Le premier titre de cette nouvelle collection de petites monographies, écrit par Remy Ricordeau, Visionnaires de Taïwan, est consacré aux environnements naïfs, bruts ou simplement visionnaires, que Remy a découverts dans l'île de Formose. J'y reviendrai.
00:30 Publié dans Art immédiat, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
13/09/2015
"Création Franche" n°42, et codicille pour l'expo "Outsiders d'Indonésie"
Bon an mal an, la revue Création Franche continue son petit bonhomme de chemin. Voici le 42e numéro d'une publication dont on n'aurait pas cru possible une telle longévité. C'est tout à son honneur, d'autant qu'étant donné le retrait du fondateur de la revue, Gérard Sendrey (en même temps que du Musée, qui fut au début un "Site"), et sa continuation sous la férule d'un nouveau directeur, Pascal Rigeade, on aurait pu croire à une cessation d'activité, faute de moyens. Que nenni, avec celui-ci au contraire, il semble que la revue ait atteint un rythme de croisière tout à fait confortable.
Création Franche n°42, juin 2015
La revue est avant tout centrée sur les créateurs et les artistes de la collection permanente du musée certes, mais ne s'interdit pas des incursions du côté de personnages non encore inscrits sur ses cimaises ou dans sa réserve. C'est ainsi que parmi d'autres sujets traités dans ce dernier numéro (Claudine Goux, Juda, Rina Nasi, Catherine Rivière), j'ai pu évoquer le cas de ce dessinateur nouveau venu (en ce qui concerne le dessin, car auparavant, il s'était fait connaître comme photographe, tout aussi autodidacte que dans le domaine de l'art graphique), sous ce titre: "José Guirao, dessinateur par réaction vitale".
Première page de l'article de Bruno Montpied dans Création franche n°42
Je renvoie les lecteurs qui souhaiteraient en apprendre plus sur ce créateur vers la revue et me contenterai de reproduire ici quelques dessins différents de ceux parus dans mon article.
Sur ce blog, j'avais déjà parlé de ce monsieur Guirao, voir ici.
Sinon, j'y avais également causé de l'expo estivale montée par le musée de la Création Franche à propos d'Outsiders indonésiens, en disant au passage qu'on ne savait pas très bien qui se cachait derrière les textes proposés par le dossier de presse qui présentait l'expo, ni qui était l'instigateur de la manifestation. Depuis mes propos, le musée a eu l'amabilité de m'expédier le catalogue de l'expo (voir ci-contre) qui nous en apprend plus finalement sur ce chapitre. Il est préfacé par Pascal Rigeade qui souligne ce que les huit créateurs rassemblés autour de la figure centrale de Noviadi Angkasapura (à la manière peut-être du mouvement singulier réuni et dirigé par Raymond Reynaud autrefois à Salon-de-Provence, dans une autre modalité?) doivent à l'animation d'Angkasapura, tout en préservant cependant leurs originalités. Et on nous y dit également que l'exposition a pu être rendue possible grâce au "relais avisé autant qu'actif" de Damian Michaels, autre artiste de la mouvance singulière internationale (Américain d'origine, il réside en Australie à Melbourne où il dirige une revue sur l'Art Visionnaire). Il fallait donc ce codicille à mon précédent billet.
23/08/2015
D'Alphonse Gurlhie à René Gregogna, une exposition à Beauchastel, patrie de Gurlhie le braconnier de l'art
René Gregogna, j'ai eu l'occasion d'en parler plusieurs fois par le passé sur ce blog, était un artiste attachant, très varié dans son expression, alternant peut-être le pire et le meilleur, charriant toutes sortes de matériaux qui lui venaient sous les mains, repeignant une digue entière du côté de Pézenas, peignant les cailloux dans le lit des rivières... Dans sa jeunesse, il n'en faisait pas mystère, il avait rencontré un authentique créateur brut, Alphonse Gurlhie, qui vécut entre Beauchastel et Maisonneuve en Ardèche, actif des années 1920 à 1940, racontant ses exploits de chasseur et de pêcheur à travers des statues de ciment qu'il avait installées aux abords de ses deux différentes maisons. Et cette rencontre l'avait profondément marqué. Je l'avais croisé, lors de son passage à Paris pour l'avant-première d'un film d'Anne Desanlis sur lui, et l'avais interrogé sur ce rapport avec Gurlhie. Il est assez rare qu'on ait ainsi des aveux d'influence chez des artistes de l'art singulier, pourtant souvent impressionnés par les créateurs de l'art brut. Nul doute que ce rapport Gurlhie-Gregogna se trouve passablement explicité à l'occasion de l'exposition que montera à partir du 19 septembre l'association des Amis de Gurlhie. Ce sera peut-être aussi l'occasion de revoir les œuvres de Gurlhie qui sont conservées au musée de Beauchastel, qui était fermé aux dernières nouvelles.
00:32 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : association "les amis de gurlhie", beauchastel, alphonse gurlhie, rené-françois gregogna, art singulier, environnements spontanés populaires, musée de beauchastel, anne desanlis | Imprimer
06/08/2015
"Outsiders" indonésiens à Bègles
Endru Sil, encre sur papier, 19,5 x 28,4 cm, 2014
Noviadi Angkasapura, encre sur papier, 15,7 x 20,9 cm, 2014
Tri Oktafiyani, encre sur papier, 32,8 x 21,5 cm, 2014
Muhammad Nasir, encre et crayon sur papier, 17,9 x 25 cm, 2014
Shony Wijaya, stylo à bille et crayons de couleur sur papier, 14,8 x 21 cm, 2014
Erna KD, encre et stylo bille sur papier, 21 x 29,7 cm, 2014
Il reste un mois pour aller voir l'expo originale montée au Musée de la Création Franche à Bègles (26 juin - 6 septembre 2015) sur des "Outsiders d'Indonésie".
Ce n'est en effet pas banal comme manifestation. Les amateurs d'art brut ou singulier indonésien n'avaient eu que peu de créateurs à se mettre sous la dent, si j'ose dire. L'un d'entre eux étant cette créatrice génialement inspirée du nom de Ni Tanjung, révélée par les expositions et les publications de la Collection de l'Art Brut à Lausanne (notamment récemment au moment de l'exposition "L'Art Brut dans le Monde"). Si ses peintures sur pierres (des représentations d'esprits je crois) ont disparu petit à petit dans le site en plein air où elles étaient installées (à Bali), elle a continué à s'exprimer sur papier de fort poétique façon.
Ce qu'il restait des pierres peintes de Ni Tanjung en août 2008 à Bali, ph. Petra Simkova
Un autre créateur indonésien fut également montré à Vitré au sein du Centre Français du Patrimoine Culturel Immatériel. Cet auteur javanais a pour nom Dani Iswardana. Sans avoir vu son exposition à Vitré, j'avais trouvé les reproductions de certaines de ses œuvres tout à fait intrigantes. Est-ce l'effet des croisements entre différentes cultures sur ces territoires variés d'Indonésie entre échos de l'art ancien des Papous, influences culturelles musulmanes et bouddhisme, toujours est-il qu'il semble bien que dans ces contrées si éloignées de l'Europe on ait affaire à un riche creuset d'expressions artistiques. Rappelons (source Wikipédia) que cette république d'Indonésie est composée de plus de 17 000 îles, que sa population est la 4e du monde (à majorité musulmane) et qu'elle se situe géographiquement au carrefour d'influences venues à la fois du Moyen-Orient, de l'Inde, des pays asiatiques et de l'Océanie. Parmi ses îles les plus connues, on peut citer Sumatra, Java (où se trouve la capitale Djakarta), les îles Célèbes, les îles Moluques, la Papouasie, une partie de Bornéo, Bali... On a dénombré 1100 ethnies différentes, plus de 700 langues...
Une œuvre de Dani Iswardana montrée à Vitré en 2010 ; Ce plasticien accompagnait ses toiles de récits (art du wayang beber) de façon analogue aux rouleaux narratifs peints des patuas indiens ou au kamishibai japonais (images supports de contes rangées dans des petites armoires ambulantes)
A Bègles, les œuvres présentées paraissent avant tout d'ordre graphique comme on peut en avoir un échantillon en tête de cette note. Elles émanent de créateurs tous autodidactes qui ont pour point commun d'être tous plus ou moins liés au plus productif d'entre eux, le nommé Noviadi Angkasapura, qui ambitionne d'atteindre bientôt le million de dessins afin de fonder un musée à lui seul consacré, musée qui serait un moyen de rendre grâces à ses ancêtres, comme il est dit dans le dossier de presse de l'exposition béglaise (malheureusement non signé : qui est l'instigateur de cette exposition, on ne le sait pas ; cela donne l'impression que l'expo tombe du ciel...). Il paraît stimuler sans cesse autour de lui les potentialités créatives des différents individus qu'ils repèrent autour de lui comme porteurs de pratiques expressives en herbe.
Noviadi Angkasapura, sans titre, 30 x 20 cm, sans date repérée, coll. privée Paris, ph. Bruno Montpied
09:25 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Le conte en rapport avec d'autres expressions | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : outsiders d'indonésie, art brut indonésien, noviadi angkasapura, musée de la création franche, dani iswardana, ni tanjung, petra simkova, collection de l'art brut, cfpci, récits et peinture | Imprimer
31/07/2015
Expo de l'Art en Marche à Moulins
Du 6 juillet au 21 août 2015 à l'Hôtel du Département à Moulins
Les choix esthétiques de L'Art en Marche, disons-le sans ambages, ne sont pas pour leur majorité ma tasse de thé. Il y a trop, du moins dans le rassemblement visible à Lapalisse dans l'immense entrepôt qui l'abrite, d'artistes ailleurs qualifiés de "singuliers" mais manquant singulièrement d'originalité (à mes yeux, s'entend, ce n'est qu'un avis purement personnel). Mais il existe aussi une minorité de créateurs proches de l'art brut ou de l'art populaire contemporain, et aussi des artistes plus inspirés, marginaux talentueux peu connus (comme Jacques Renaud-Dampel par exemple ou Pépé Donate). A Moulins, du 6 juillet au 21 août, voici une petite sélection intéressante, où le terme d'art brut ne paraît cette fois pas trop usurpée.
Une œuvre de Pépé Donate exposée au musée de l'Art en Marche à Lapalisse en avril 2014
Sur les cinq artistes ou créateurs présentés à Moulins, il en est au moins trois à recommander de la part du Poignard Subtil, à savoir Monique Le Chapelain, Jean Tourlonias et Popy (alais Guy Maraval). On pourrait très bien ne pas remarquer le dernier nommé, mais je dois à un camarade qui visitait avec moi le dit entrepôt le printemps dernier (alors que Luis Marcel avait annoncé à grands renforts de trompe qu'il vendait tout - combien de fois a-t-il "tout" vendu?, me demandé-je maintenant...) de l'avoir remarqué en achetant une des ses œuvres ce qui fit que je pus repasser plusieurs fois devant par la suite, et que je me surpris à changer d'humeur à son égard au fil du temps. Il faut croire que Popy, ancien marin qui s'est mis à peindre (à l'acrylique) depuis un grave accident où il paraît avoir vu la mort de près, ne fait pas de l'art "immédiat" en dépit d'un graphisme pourtant élémentaire et d'un vocabulaire de sujets volontairement réduit. C'est peut-être à cause de cela du reste que je passai à côté au début. "Trop proche de Chaissac", me suis-je dit tout d'abord. Et pourtant un charme opère à la longue, du moins en ce qui concerne les œuvres que je reproduis autour de ces lignes (la première s'intitulant "Spirale" et la seconde "L'Œuf"), datant de la fin des années 90.
Monique Le Chapelain, Grand éléphant décoré, 20F (inventaire Muel D85), 1997, coll. Bruno Montpied (cette œuvre bien entendu ne préjuge pas de celles qui sont présentées à Moulins)
Monique Le Chapelain, je n'ai plus de nouvelles d'elle. J'ai contribué autrefois à la faire connaître, notamment par le truchement de la revue Création Franche, et puis, affamé perpétuellement de nouvelles découvertes, j'ai fini par laisser se distendre les rapports. Elle menait une vie assez rangée en compagnie de son époux dans une banlieue assez quelconque, du côté des Ulis, que rompaient seules de temps à autre des sorties dans des soirées dansantes qui étaient son plaisir suprême. Elle passait pour l'occasion des robes étourdissantes colorées et vaporeuses qui lui composaient un écrin pour la princesse qu'elle n'avait jamais cessé de rêver être depuis son enfance. Ces robes, ces parures se retrouvaient transposées dans ses peintures et ses dessins, parfois trop hâtivement brossées tellement elle était pressée de produire. Ses dessins et gouaches sont moins connus que ses peintures à l'huile, mais mériteraient pourtant d'être appréciés, étant donné leur relative "tranquillité". Les quelques exemples que je conserve ont une stabilité dans la facture, une maîtrise exempte de la précipitation dont je parlais ci-dessus. Je donne deux exemples de sa production que je conserve, une peinture à l'huile tout d'abord (ci-dessus) et immédiatement après une gouache justement...
Monique Le Chapelain, Coq de piques, 1963
Jean Tourlonias est le plus connu des trois, avant tout pour ses véhicules (motos, voitures de course...) portant les noms de vedettes connues et les noms des personnes à qui les peintures étaient destinées. il figurait en bonne place à l'exposition thématique de la Collection de l'Art Brut à Lausanne sur les véhicules (en 2013-2014). Habitant Cébazat près de Clermont-Ferrand, c'était un peu le régional de l'étape. Si l'on a vu à Lapalisse des petits paysages sans grand relief, on l'estime avant tout pour ses bolides ébouriffants dédiés aux destinataires des ces véhicules futuristes.
Jean Tourlonias est passé un jour par La Godivelle et ses deux lacs, sur les rudes hauteurs du Cézallier, petite peinture photographiée par Régis Gayraud sur une brocante auvergnate en 2015...
Trois Tourlonias aux noms des anciens animateurs de la Collection de l'Art Brut à Paris, puis à Lausanne, ph. BM
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22/07/2015
Un catalogue d'expo "La Mayenne à l'oeuvre" au Centre Kondas d'Art Naïf en Estonie
On peut désormais trouver en vente à la librairie de la Halle St-Pierre (par exemple...) le catalogue de l'expo "La Mayenne à l'œuvre: Destins croisés" organisée à Viljandi au Centre Kondas d'art naïf. J'ai déjà évoqué cette manifestation montée par l'Association CSN 53 ("Création Naïve et singulière en Mayenne"), conçue et coordonnée par Jean-Louis Cerisier, avec l'aide entre autres de Serge Paillard et Michel Leroux.
L'Estonie, c'est un peu loin... Et donc ce catalogue permet d'en voir davantage. Sur les créateurs et artistes mayennais, et aussi pour partir à la découverte de ce mystérieux inconnu qu'est Paul Kondas qui, s'il a été recensé dans l'Encyclopédie mondiale de l'Art Naïf (en 1984...), reste largement inconnu par nos contrées. Ce qui est dommage étant donné les quelques quatre peintures que nous montre le catalogue... (On aimerait fortement en voir plus).
Paul Kondas, Fleur de fougère, 80,5 x 51 cm, huile sur toile, 1980, coll. Musée de Viljandi (j'aime beaucoup le procédé de cerne blanc créant un halo luisant autour des personnages et des ronds dans l'eau, halos créés par l'éclat de la lune dans l'esprit de l'artiste, lune qui nimbe toute la scène d'une lueur de merveilleux)
Paul Kondas, Chasseur aux lapins, 140,5 x 86 cm, huile sur toile, 1977, coll. Musée de Viljandi
Dans l'esprit du concepteur de l'expo, il s'agissait donc d'esquisser une sorte d'échange entre des artistes mayennais et ce peintre naïf dont 26 œuvres furent acquises par le musée de Viljandi qui lui voua aussi son nom apparemment. Je ne sais pas à l'heure où j'écris ces lignes s'il est arrivé à convaincre Laval d'exposer des œuvres de Paul Kondas.
Henri Rousseau, La fabrique de chaises à Alfortville, prêt temporaire du Musée de l'Orangerie à Paris dans le cadre des collections permanentes du Musée d'Art Naïf et d'Art Singulier de Laval en février 2015 (pour pallier les prêts que ce dernier musée avait consenti au Palais des Doges à Venise dans le cadre d'une rétrospective Rousseau)
Certains pourront peut-être se demander pourquoi avoir adopté une perspective aussi régionaliste, par un curieux désir de se construire un destin ancré dans une zone départementale... Ce serait oublier qu'il s'est passé depuis déjà un siècle un curieux ancrage artistique à Laval et sa périphérie. Tout étant parti sans doute d'Henri Rousseau dit "le Douanier", puis de la fondation du Musée d'Art Naïf du Vieux-Château dont les collections s'enrichirent au départ d'un important socle d'œuvres provenant des collections rassemblées par Jules Lefranc, autre peintre naïf fort important, à la lisière d'une figuration poétique savante, de laquelle pourrait aussi participer l'œuvre d'un Elie Lascaux, originaire d'une autre partie de la France, le Limousin.
Jules Lefranc, Le môle noir, gouache sur papier, vers 1930, Musée d'Art Naïf et d'Art Singulier de Laval
C'est peut-être cette ouverture de Lefranc vers une figuration réaliste poétique qui amena d'autres peintres du cru, comme Henri Trouillard, à voguer de dérivation en dérivation vers des horizons carrément visionnaires, des Robert Tatin (présent par des lithographies dans l'expo Cerisier), des Alain Lacoste (lui aussi exposé à Viljandi) arrivant dans les décennies suivantes avec dans leurs bagages une liberté de ton encore plus radicalement éloignée de la représentation du réel "rétinien" (on les range dans ce qu'il est convenu d'appeler "l'art singulier", catégorie d'artistes en marge, semi-professionnels, au dessin automatique et empirique, plus ou moins inspirés par les exemples du surréalisme, de COBRA, ou de l'art brut). Jacques Reumeau pour sa part synthétisa peut-être toutes ces tendances dans le "melting-pot" d'une œuvre qui débouchait parfois dans l'hétéroclite, dérapant même jusqu'à une forme de ratage pathétique dans quelques cas. Deux œuvres reproduites dans le catalogue, provenant des collections Cerisier et Leroux, sont au contraire bien abouties, illustrant bien ce que j'appelle le "melting-pot" stylistique que paraissait rechercher Reumeau (et qui fait sa marque de fabrique, semble-t-il).
Jacques Reumeau, L'oiseau et le poisson, la rencontre, 64,5 x 49,5 cm, pastel, 1975, coll. Art Obscur Michel Leroux
Après ces glorieux aînés, vinrent toutes sortes d'autres artistes mayennais ou d'adoption (comme Joël Lorand, venu s'installer un temps en Mayenne ; je le crois aujourd'hui plutôt posé à Alençon) dont nous parle à l'occasion Jean-Louis Cerisier. Dans son expo en Estonie, on remarque les œuvres de Brigitte Maurice (figurative poétique semble-t-il), de Serge Paillard ou de Marc Girard. A suivre les indications de Cerisier dans ce catalogue, on comprend donc qu'il y a bien un creuset particulier dans cette belle région mayennaise.
Brigitte Maurice, Sans titre, 31,2 x 29 cm, huile sur bois, 2014, coll. Jean-Louis Cerisier
Et même si Jean-Louis Cerisier paraît avant tout s'intéresser à l'art dans une perspective de plasticien contemporain féru d'histoire de l'art, il n'oublie pas d'inviter des créateurs que l'on pourrait ranger dans l'art brut, comme Gustave Cahoreau, Patrick Chapelière (découvert et défendu au départ par Joël Lorand) ou "l'Ami des Bêtes" Cénéré Hubert pour lequel j'ai une certaine prédilection, créateurs "bruts" en cela qu'ils paraissent vivre (ou paraissaient vivre dans le cas de Hubert, décédé en 2001) au plus près leur création dans une proximité fusionnelle.
Cénéré Hubert, devant le portail décoré de son atelier, St-Ouen-des-Toits (Mayenne), ph. Michel Leroux
20:39 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : mayenne à l'oeuvre, jean-louis cerisier, serge paillard, centre paul kondas, viljandi, art naïf, art singulier, musée du vieux-château à laval, douanier rousseau, alain lacoste, robert tatin, henri trouillard, jacques reumeau, patrick chapelière, céneré hubert, jules lefranc | Imprimer
17/07/2015
Retour sur "Brut de Pop' " à l'écomusée de Marquèze, Art populaire et art brut, ou Art populaire et art singulier?
J'ai reçu le catalogue de l'exposition qui s'est terminée le 28 juin à l'Ecomusée de Marquèze dans les Landes, réalisée en partenariat avec le Musée de la Création Franche de Bègles (je profite de cette note pour remercier les responsables de ce dernier). Ce catalogue, présentant les motivations de ses organisateurs (principalement les conservateurs de l'Ecomusée de Marquèze), appelle quelques remarques de ma part, d'autant qu'une de mes déclarations écrites y est prise à témoin, gentiment contestée (comme quoi l'art populaire au sens rural, collectif et normé aurait disparu et survivrait de façon individualiste dans une partie de l'art brut).
"Brut de Pop' " se proposait de confronter l'art populaire et "l'art brut", assimilé par la principale commissaire de cette exposition, Vanessa Doutreleau, tout uniment, dans un bel amalgame qui ne s'embarrasse que de peu de nuances, à l'ensemble de la collection du musée de la Création Franche à Bègles, qui avait prêté pour cette manifestation environ 250 œuvres. Je parle d'amalgame et d'absence de nuances dans la terminologie parce que comme le savent ceux qui fréquentent ce musée, il existe de fortes différences, à la fois en termes de sociologie de l'art qu'en termes d'inspiration et d'arrière-plans culturels, entre les différentes expressions plastiques conservées à Bègles.
On y trouve de l'art brut, mais aussi de l'art naïf, de l'art populaire contemporain, de l'art contemporain singulier, des surréalistes se revendiquant en tant que tels aujourd'hui même (en filiation avec le mouvement surréaliste historique et non pas de façon unilatéralement proclamée, comme cela paraît se produire ici et là, notamment à Bordeaux), le tout s'amalgamant dans ce que Gérard Sendrey a étiqueté "création franche" (sans parvenir véritablement au fil du temps à imposer le terme) et qui ces derniers temps se laisse aussi englober sous l'étiquette d'art marginal¹ pour ne plus dire "art singulier" qui, du fait de ses terribles succédanés - les sous-Chaissac et les producteurs de têtes à Toto en pagaille - est un terme aujourd'hui bien galvaudé.
Jean Dominique (en haut) et Gabriel Vergez (en bas), catalogue Brut de Pop'
René Guisset, danseurs aux rubans, sculpture coll. Alain Moreau
Si Vanessa Doutreleau a totalement raison quand elle met en regard les sculptures naïves et frustes (terme non péjoratif sous les touches de mon clavier) de Jean Dominique, voire aussi de René Guisset (tous deux présents dans la collection de la Création Franche) avec celles de l'autodidacte de semblable culture populaire Gabriel Vergez (qui fait partie de la collection de l'écomusée de Marquèze et qui à cette occasion s'est révélé être une véritable découverte), Dominique et Guisset exemples tous deux de sculpture populaire contemporaine², les autres comparaisons de notre commissaire d'exposition - par exemple lorsqu'elle confronte les œuvres d'artistes, plus ou moins consciemment déférents à l'égard des œuvres de l'art populaire rural (comme le font entre autres Jean-Joseph Sanfourche ou Gilles Manero), avec d'autres objets venus de la collection d'art populaire de l'Ecomusée de Marquèze, objets religieux ou bien outils - ces autres comparaisons ne renvoient plus à une confrontation art populaire rural/art brut, mais plutôt à un rapport art populaire rural/art singulier. Or l'écart entre ces deux catégories, pour le coup, se trouve être bien plus large.
Ce véhicule brinquebalant de Burland peut paraître associable à l'art brut... Mais seulement si on ignore que son auteur, suisse, a beaucoup vu d'œuvres d'art brut... qui l'ont probablement passablement marqué
Carlo M, bateau le Sozialis, art produit en hôpital psychiatrique en Suisse ; une référence pour François Burland ?
Jean Bordes relève quant à lui nettement plus nettement de ce que l'on appelle l'art brut, du genre structures amalgamées-ficelées (voir Judith Scott aussi) ; lui aussi a pu influencer certains singuliers que l'on qualifie du coup de "bruts", par confusion des genres je trouve
Voici une maquette de trolley du Néerlandais Willem Van Genk qui lui aussi a dû impressionner François Burland... ; selon moi ce dernier illustre bien un type d'artiste contemporain singulier qui connaît si bien l'art brut qu'il en est profondément marqué ; cependant il s'en distingue généralement par un aspect esthétisant qu'il ne peut que difficilement éviter (voir la première image de cette série, l'œuvre de François Burland, un tantinet plus pimpante...)
L'art singulier, autrement appelé Création Franche à Bègles ou Neuve Invention à Lausanne, regroupant toutes sortes d'artistes semi-professionnels, en marge du système traditionnel des Beaux-Arts, artistes auxquels le terme turfiste d'outsider correspond finalement assez bien (c'est le canasson pas favori au départ qui peut finir par arriver bon premier...), l'art singulier est en effet assez différent - par ses substrats culturels, et par les connaissances artistiques de ses auteurs - du jaillissement irrépressible de l'art véritablement brut. L'art singulier, produit de créateurs semi-artistes – "semi", parce qu'introduits de façon limitée dans le monde professionnel (c'est évidemment variable selon les cas) – l'art singulier est une pratique de l'art, la majeure partie du temps autodidacte, où l'on sent malgré tout une culture artistique à l'œuvre par-dessous. Culture artistique souvent forgée de manière personnelle, et influencée par l'exemple rude et direct des créateurs de l'art brut.
Les semelles peintes d'Alain Pauzié, artiste atypique de la Création franche et de l'art singulier, n'ont en commun avec les sabots décorés de l'art populaire que le fait d'appartenir au monde de la chaussure ; la confrontation des deux arts débouche ici sur une confrontation art populaire/art contemporain (marginal): pourquoi pas? Mais l'étude devrait alors être infiniment plus vaste, ouvrant sur des perspectives beaucoup plus cruciales (l'usage social de l'art) qui ne paraissent pas faire partie de ce qu'ont recherché les organisateurs de "Brut de Pop' ")
L'automatisme, même si il n'est pas revendiqué sous ce vocable, est largement pratiqué dans l'art singulier où l'on reconnaît des artistes tout à fait anticonformistes qui sont aujourd'hui diffusés par les médias, comme Gaston Chaissac par exemple, énormément imité çà et là par tant et tant d'épigones moins originaux. Cobra, Dubuffet, les surréalistes, Miro, l'art populaire, mais parfois aussi l'expressionnisme allemand, en plus généralement de tout ce qui se fait connaître à travers de grandes expositions évoquées par les médias, bouleversent et chamboulent les esprits de ces autodidactes qui se lancent dans l'art avec spontanéité. Un certain primitivisme dans l'expression, un goût des couleurs vives pour ne pas dire criardes, sont des caractéristiques récurrentes dans ces arts singuliers.
Vanessa Doutreleau, qui s'intéresse visiblement beaucoup à l'art populaire (ce en quoi elle nous est sympathique, de même que le concept de cette exposition), s'efforce donc de trouver des parallèles entre les collections de son écomusée et certaines œuvres du musée de la création franche qu'elle assimile à la louche à l'art brut. Elle veut s'attacher à prouver que l'art populaire n'est pas mort, et qu'il survit aujourd'hui dans ce qu'elle prend pour de l'art brut à Bègles. Elle aurait dû je pense, tout en triant plus judicieusement dans la collection du musée de Bègles (garder Jean Dominique et Emile Ratier...), se tourner en outre du côté de plusieurs autres collections et peut-être notamment interroger des collections d'art populaire contemporain, comme celle du petit musée des Amoureux d'Angélique au Carla-Bayle dans l'Ariège, ou puiser dans l'histoire des expositions montées dans le passé par le Musée International des Arts Modestes à Sète et ailleurs. L'art modeste est en effet un concept qui recoupe assez largement celui d'art populaire contemporain, même si son défenseur, le peintre Di Rosa l'a tellement élargi qu'il en est devenu un inénarrable fourre-tout (pin-ups sur camions, mouchoirs dessinés par des taulards, skate customisés, décors de flippers, collectionnites aiguës, jouets anciens, publicités, ex-voto contemporains, affiches peintes à la main, masques de catcheurs mexicains, etc.).
Cette confrontation entre une machine à tailler la bruyère bricolée par Jean Cazenave (collection de l'Ecomusée de Marquèze) et la maquette de bois assemblés d'Emile Ratier apparaît ici parlante, mais l'on a affaire avec Ratier à un authentique créateur populaire, intégré à l'art brut
L'art brut de son côté, s'il contient (s'il a contenu) beaucoup de cas de créateurs d'extraction populaire, coupés de la culture traditionnelle des anciens artisans ruraux, rassemble aussi des créateurs cultivés en situation de rupture, parfois fort cérébraux (des illuminés mystiques confus, des adeptes de la numérologie et des diagrammes ou schémas en tous genres, des handicapés non indemnes de culture artistique exhibée par leurs thérapeutes). Le concept d'art brut est devenu du coup de plus en plus flou.
C'est là que je me dois de souligner mon évolution personnelle face à ces transformations. Personnellement, je cherchais autrefois dans l'art brut une dimension de naïveté et d'immédiateté, proche du regard enfantin, qui provenait de la part populaire de l'art brut (je m'y intéresse cela dit toujours). J'ai cherché, dans l'article des actes I du colloque sur l'art brut monté par Barbara Saforova dans le cadre d'un séminaire qu'elle mène, à dresser des passerelles entre art brut et art populaire. Cet article est cité par Vanessa Doutreleau dans ses textes du catalogue. Mais elle me range aux côtés d'un Michel Thévoz (ce qui m'honore grandement) pour conclure que j'aurais conclu à la mort de l'art populaire. Que nenni pourtant... Même si je réitère que l'art populaire rural d'autrefois, aux normes esthétiques assumées par les communautés, aux produits utilitaires, a bien quasiment complètement disparu en France, je trouve néanmoins qu'on peut encore trouver ici et là des formes de regain anarchiques, déconnectées d'une intégration à la vie du peuple.
De plus, si je ne le trouve plus beaucoup dans l'art brut new look qu'on cherche à mettre en avant entre autres à la galerie Christian Berst, je continue de le retrouver chez les créateurs d'environnements spontanés que j'ai étudiés dans mon livre Eloge des Jardins anarchiques (que Mme Doutreleau ne paraît pas avoir lu, ce qui est dommage car elle y aurait vu que j'y défends certains inspirés qui travaillent dans un esprit collectif, comme la famille Montégudet en Creuse par exemple), et aussi ailleurs, notamment chez toutes sortes de créateurs inaperçus ou complètement anonymes que l'on rencontre la plupart du temps plutôt en brocante que dans les galeries. Les ventes aux enchères, les vide-greniers sont des endroits où réapparaissent toutes sortes de créateurs la plupart du temps oubliés, peu remarqués parce que leurs œuvres sont restées peu nombreuses, et naïves. Ce blog en a présenté régulièrement plusieurs d'entre elles.
Des bouteilles peintes de Louis Beynet, coll. privée, Paris ; j'ai présenté ce travail naïf insolite dans le n°3 de la revue L'Or aux 13 îles
Je ne crois donc pas à la disparition de l'art populaire. Il s'est fait seulement plus individualiste, plus libre partant de là, toujours aussi marqué par un regard d'enfant préservé, et n'intéressant que peu le marché de l'art (et tant mieux!). Les catégories d'art populaire contemporain ou d'art populaire insolite que j'ai insérées dans la colonne de droite sur ce blog atteste de mon intérêt pour cette permanence de l'art populaire.
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¹ Ce terme d'art marginal est revendiqué pour cet été dans un communiqué de presse rédigé par Oana Amaricai annonçant un festival du même nom à Montcuq dans le Lot (je ne sais s'il y a eu malice dans le choix de ce bourg...). La manifestation est organisée par elle (du 1er au 15 août ) en collaboration avec Jean-Luc Bourdila et Marcel Benaïs, présenté par ailleurs comme "artiste ufologue" (c'est-à-dire qui voit des soucoupes volantes partout?). Je souscris assez au texte de cette dame. Oana Amaricai et Jean-Luc Bourdila sont par ailleurs animateurs de cet autre festival d'art marginal le "Grand Baz'Art à Gisors" qui s'est tenu le récent week-end du 4-5 juillet dernier. Si j'ai le temps, j'y reviendrai bientôt, afin d'évoquer un créateur que j'y ai rencontré.
² Cette sculpture populaire contemporaine est une catégorie qui prend parfois l'allure d'un sous-ensemble de l'art brut, quoique ce dernier ait tendance à évoluer considérablement du fait de l'emprise de certains marchands, puisqu'on y intègre de plus en plus des œuvres d'esprits savants en rupture, du type Lubos Plny ; l'œuvre de ce dernier est stylistiquement à des années-lumières de la naïveté d'un Vergez ou d'un Jean Dominique. L'art brut est ainsi associable plus facilement avec les œuvres d'un certain type d'art plastique contemporain. On voit ce que vise aussi cette manœuvre, attirer d'autres collectionneurs vers cet art brut devenu plus intellectuel, partant plus présentable aux yeux d'un amateur d'art contemporain.
18:26 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art populaire contemporain, Art populaire insolite, Art singulier, Confrontations, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : brut de pop', création franche, écomusée de marquèze, art populaire et art brut, art populaire et art singulier, jean dominique, vanessa doutreleau, gabriel vergez, rené guisset, françois burland, art brut, usage social de l'art, art modeste, art populaire contemporain, amoureux d'angélique, louis beynet, bruno montpied | Imprimer
09/07/2015
Migas Chelsky, un dessinateur (entre autres...) inspiré
Migas Chelsky, alias Michel Gasqui, dont j'ai déjà parlé ici et là sur mon blog pour ses entreprises de sauvegarde du cinéma amateur, pour lequel, en compagnie de quelques amis, il a fondé une Cinémathèque du Cinéma Amateur, qui conserve films en format 8 mm, 9,5 mm et Super 8, mais aussi du matériel de projection, de visionnage, des colleuses, etc., Migas Chelsky vient montrer à Paris du 6 au 23 juillet d'autres facettes de ses talents, à savoir des peintures, des collages et des œuvres bricolées. Le vernissage est pour ce jeudi 9 juillet à partir de 18h au 105 rue de la Réunion dans le XXe ardt.
Personnellement, je reste plus particulièrement fasciné par son inspiration graphique. J'en donne ci-dessous quelques exemples à mes yeux tout à fait frappants. Un grand dessinateur bien méconnu, et complètement autodidacte, n'est-il pas?
Pas de titre renseigné par moi, format? Encre (?) sur papier, date?
Pas de titre renseigné par moi, encre? Stylo?
Machin, technique? Date? Dimensions?
Plainte montagnarde, idem...?
Dessin 1, stylo sur papier, 2011
Dessin 2, stylo sur papier, date non donnée
Inquiétude, encre sur papier, 29,7 x 21 cm, 2012, coll. privée, Paris
Sirènes, dimensions ? Date? Technique?
00:57 Publié dans Art singulier, Cinéma et arts (notamment populaires) | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : migas chelsky, galerie rouge 105, michel gasqui, dessins visionnaires, cinémathèque du cinéma amateur | Imprimer
29/06/2015
A Rothéneuf, expo de l'association des amis de l'oeuvre de l'abbé Fouré et redécouverte d'une sculpture de "l'Ermite"
Voici la nouvelle exposition à la fois documentaire et artistique sur l'abbé Fouré et "l'art brut en Bretagne" que présente l'association des amis de l'œuvre de l'abbé pour cet été à l'Hôtel le Terminus du Val, avec à la clé, l'exhibition, au moins sur l'affiche, d'une nouvelle sculpture attribuée au fameux ermite. Je dis cela ainsi, avec une feinte réticence, parce que rien ne nous a été transmis au sujet des conditions de cette attribution, d'où la sculpture provient, comment elle est parvenue entre les mains de l'association, est-on sûr qu'il ne s'agit pas d'une copie des œuvres de l'abbé dans un style "à la manière de", etc.
La sculpture retrouvée attribuée à l'abbé Fouré, avec la même inscription que sur le rosier précédemment retrouvé en 2010
Détail d'une carte postale du vivant de l'abbé montrant à gauche le gisant de St-Budoc avec l'ange étendant ses ailes au-dessus du gisant et des trois niches
Ce qui restait en 2010 du même autel de St-Budoc... ; l'ange est complètement rongé..., ph. Bruno Montpied
A bien la détailler, avec son inscription, "Œuvres de l'Ermite de Rothéneuf A. Fouré", surmontant la représentation taillée en bas-relief d'un gisant que paraît protéger un ange, représentation visiblement démarquée de la sculpture qu'avait taillée l'abbé dans les rochers le long de la côte (toujours visitables aujourd'hui comme on sait, quoique fort dégradés) montrant le gisant de Saint-Budoc, à bien la détailler, donc, on se dit que le style ressemble apparemment bien à celui de l'abbé, et qu'il pourrait s'agir, par exemple, d'un panneau autrefois apposé à l'extérieur de l'ermitage pour indiquer aux curieux ce que le musée de l'abbé abritait derrière son mur crénelé, surmonté de têtes sculptées en pierre. Si cette hypothèse se révélait fondée, cela ouvrirait un espoir que d'autres pièces de ce petit musée incroyable aient pu être sauvées.
Autre sculpture retrouvée de l'abbé Fouré en 2010, apportée par sa propriétaire au cours d'une exposition montée à Rothéneuf par Joëlle Jouneau, ph. BM
Je veux le croire en tout cas. Sans pourtant effacer l'intuition funeste que j'ai depuis fort longtemps, selon laquelle on risque bien de ne retrouver des sculptures de l'abbé, finalement, que peu de pièces décisives, soit des cadeaux faits à des obligés (comme la sculpture d'un rosier qu'on vit réapparaître à Rothéneuf lors d'une expo des débuts de l'Association en 2010, j'en avais parlé ici même, et voir ci-dessus), soit des meubles, des objets manufacturés ayant appartenu à l'abbé, ou des sculptures sans grande valeur, ayant quitté l'ermitage en 1910 lors de la vente aux enchères qui suivit la mort de l'abbé et dont j'ai publié le récit, écrit par Eugène Herpin, alias Noguette, dans le dossier que j'ai consacré au musée disparu de l'abbé Fouré dans la revue L'Or aux 13 Îles n°1 en janvier 2010 (dossier qui contenait aussi la réédition du Guide du Musée de l'Ermite). J'ai ainsi personnellement vu passer (récemment) sous mes yeux des reproductions d'un fauteuil de l'abbé (authentique puisqu'on le reconnaît sur une carte postale de la Belle Epoque, l'abbé étant assis dessus), parti d'une collection privée parisienne en direction de Montpellier (paraît-il), de même qu'on a pu voir il y a bien plus longtemps un tabernacle de l'abbé reproduit dans le livre de Michel Ragon, Du côté de l'art brut, ou qu'on peut encore découvrir une commode que possède Bruno Decharme dans la collection d'art brut ABCD (voir ci-dessous).
Fauteuil de l'abbé de passage dans une collection privée parisienne (voir ci-dessous du temps où l'abbé s'asseyait dessus)
Le même fauteuil (qui provient d'une vente aux enchères qui se tint à St-Malo dans les années 1980, où selon le témoignage du collectionneur qui le posséda un temps se vendirent quelques rares meubles de l'abbé que fort peu de gens se disputèrent...)
Tabernacle à usage privé de l'abbé Fouré ,tel que reproduit dans le livre cité de Michel Ragon
Commode en provenance également de chez l'abbé Fouré, collection ABCD
La réapparition de cette seconde pièce de bois sculpté de l'abbé Fouré, due à l'incroyable ténacité de l'animatrice de l'association des amis de l'œuvre de l'abbé, Joëlle Jouneau, acharnée à collecter depuis environ cinq ans, à rassembler toute la documentation possible sur l'œuvre et la vie de "l'Ermite", apporte cependant une assise certaine à ces archives auxquelles on souhaite de trouver à Rothéneuf un local plus pérenne.
Simone Le Moigne, coll. Art Obscur (à noter une petite -j'ai dit "petite"...- parenté d'inspiration dans cette toile avec les images que crée en Vendée Yvonne Robert)
Détail d'un objet sculpté, du "patient de St-Avé", coll. Art Obscur
En parallèle de la présentation de cette sculpture retrouvée, l'association a choisi de présenter des œuvres provenant de divers autres points de la Bretagne, soit empruntées à la collection de l'Art Obscur de Michel Leroux (Simone Le Moigne, peintre naïve ; le "patient de St-Avé" avec une sculpture d'inspiration populaire assez énigmatique ; Yvette et Pierre Darcel, créateurs d'un environnement dans la région briochine dont j'ai abondamment parlé dans mon Eloge des Jardins Anarchiques et ici même au sein de plusieurs notes), soit provenant d'autres sources, comme des œuvres du sculpteur de Kerlaz, Pierre Jaïn (il est cher à mon cœur depuis que j'ai aidé à sa redécouverte dans l'exposition d'Art Insolite au musée rural des arts populaires de Laduz en 1991), probablement prêtées avec le concours de son petit neveu Benoît Jaïn, ou encore des œuvres de Jean Grard et d'Alexis Le Breton, tous deux créateurs d'environnements dont peu de pièces circulent en dehors des sites qu'ils créèrent en plein air (celui de Jean Grard a de plus été démantelé quelques années après sa disparition).
Pierre et Yvette Darcel, la table du petit déjeuner avec cafetière et moulin à café, ces deux accessoires ayant donc fait (voir témoignage de Michel l'égaré ci-dessous en commentaires) l'objet de répliques séparables de l'environnement proprement dit, certaines étant montrées dans l'expo à Rothéneuf, ph. Bruno Montpied, 2009
10:53 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : joëlle jouneau, association des amis de l'oeuvre de l'abbé fouré, abbé fouré, ermite de rothéneuf, environnements spontanés, terminus du val, rothéneuf, sculptures retrouvées de l'abbé fouré, pierre darcel, art obscur, alexis le breton, art brut en bretagne, pierre jaïn, per jaïn, jean grard, l'or aux 13 îles n°1, noguette, eugène herpin | Imprimer
22/06/2015
Le Limousin, son François Michaud, et (plus éphémère dans la région) son Bruno Montpied...
Si vous captez France 3 Limousin, je vous signale que vendredi 26 juin prochain, en soirée, à partir de 23h10, dans la série "Enquêtes de régions", sera diffusé un sujet d'une douzaine de minutes (paraît-il, car on s'attend à tout avec la télévision) sur le sculpteur naïvo-brut, populaire, François Michaud du hameau de Masgot dans la Creuse. "François Michaud... De l'oubli à la consécration", ça doit s'appeler. Pour capter France 3 Limousin, il faut avoir soit Canalsat (canal 364), soit France Sat (canal 309), soit TNT Sat (canal 315), soit Numéricable le Box (canal 924), soit BouyguesBBox (canal 384), soit Orange ou SFR ou Free (canal 315). C'est merveilleux et simple la télé désormais, n'est-ce pas? Un vrai maquis, qui a des inconvénients, mais aussi des avantages : on peut s'y perdre, et comme par les chemins buissonniers, on peut tout de même y faire des trouvailles. Je vous souhaite que ce soit le cas vendredi soir. Sans compter qu'à un détour de l'émission, vous pourrez peut-être même me rencontrer en train de causer de l'ami Michaud, le "faiseur de marmots"...
Ancienne disposition (que personnellement je regrette) des statues de François Michaud sur le mur de son potager face à la première maison, aujourd'hui transformée en "petit musée", avec le "berger et son chien tenant un serpent entre ses pattes", les aigles napoléoniennes, une sirène au fond... Ph Bruno Montpied, 1991
François Michaud, la sirène, ph. BM, 1991
J'aime cette région du Limousin. On y est fier, on y est combatif, on ne s'en laisse pas compter, à la différence des habitants d'autres régions. Le 10 juillet – c'est un autre vendredi – aura lieu le vernissage d'une exposition de quarante de mes dessins et peintures à la Maison du Tailleu, structure créée par l'artiste Jean Estaque (dont j'ai eu maintes fois l'occasion de parler sur ce blog) pour présenter le travail d'amis artistes qui l'intrigue. Cette fois, à côté de mes dessins seront aussi montrés des éléments d'art populaire ou brut qui viennent de la collection personnelle de Jean Estaque, il y aura ainsi quelques Pépé Vignes... Et des cibles foraines, des figurines dues à des anonymes, des surprises, autant de pièces naïves que j'aime moi aussi, et qui devraient donner, je l'espère, une confrontation fructueuse avec mon univers graphique.
B.Montpied, Un nuage d'images le suivait, encres, mine de plomb et marqueurs sur papier, 29,7x21 cm, 2009 (exposé à la Maison du Tailleu)
Voici le texte de présentation de l'exposition, rédigé par Jean Estaque:
"Jean Estaque invite Bruno Montpied à La Maison du Tailleu du 10 juillet au 30 août 2015
Bruno Montpied n’est pas qu’un historien de l’art spécialiste des artistes hors-normes. Outre son travail personnel, je ne peux m’empêcher pour le présenter, de parler de son amour pour les créateurs creusois : François Michaud et Ludovic Montégudet dont il a, avant tout le monde, reconnu l’intérêt artistique. Dans son livre Éloge des jardins Anarchiques, deux chapitres leur sont consacrés. Il est aussi un créateur dont les œuvres peintes et dessinées s’imposent à nous avec une forte personnalité comme je vous invite à le découvrir.
Bruno sera présent le vendredi 10 juillet dès 15h. Vous pourrez le rencontrer et partager avec lui le verre de l’amitié.
B.Montpied, Un pistolero chez les créatures, encres, mine de plomb, crayons, marqueurs divers sur carton gris piqueté, 40x30 cm, 2014 (exposé à la Maison du Tailleu)
______
Jean et Michelle Estaque seront heureux de vous recevoir pendant la durée de cette exposition : tous les week-ends et jours fériés de 15h à 19h et sur rendez-vous au 05 55 80 00 59.
(Si vous désirez être informés des activités programmées, envoyez vos coordonnées postales ou électroniques à La Maison du Tailleu — 2009 place de l’église 23 000 Savennes — Tel : 05 55 80 00 59 contact@lamaisondutailleu.fr — www.lamaisondutailleu.fr)"
Auteur anonyme, sculpture dans du bois fruitier, coll. Jean Estaque
Figures de jeu de massacre, art forain, coll. J.Estaque
23:21 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : françois michaud, france 3 limousin, enquêtes de régions, masgot, village sculpté, environnement spontanés du xixe siècle, bruno montpied, maison du tailleu, jean estaque, pépé vignes, art populaire anonyme, art forain, jeu de massacre | Imprimer
01/06/2015
Cinéma documentaire autour des arts singuliers: le Festival Hors-Champ à Nice
Comme tous les ans à pareille époque revient le festival du Film d'Art Singulier organisé par l'association Hors-Champ en plusieurs points de la ville de Nice, dans l'auditorium de la bibliothèque Louis Nucéra, dans celui du MAMAC et apparemment aussi, et cela c'est une première, à l'Hôtel Impérial, le charmant hôtel d'un autre temps où se retrouvent d'année en année tel ou tel invité de l'association. Je me souviens en particulier d'y avoir pris le petit déjeuner en compagnie à la fois de Claude Massé, de Caroline Bourbonnais et de Francis David, réunion improbable, sous les dorures, les grands miroirs aux cadres richement ornés, les tentures, le plafond peint de la salle à manger des baies de laquelle l'œil se laissait caresser par le spectacle des palmiers défendant l'entrée de l'hôtel. Quel magnifique endroit si bien à l'écart...
Vidéo ultra-courte prise dans la salle d'attente due l'Hôtel Impérial, à Nice,
Un dessin de Friedrich Schröder-Sonnenstern représentant semble-t-il Napoléon, récupéré via internet sur le blog True Outsider
Comme on le voit sur le programme inséré ci-avant, hommage sera de nouveau rendu au cours de ce festival à Caroline Bourbonnais par l'association qui l'invita à plusieurs reprises pour les films faits par Alain Bourbonnais par exemple. Le 6 juin, personnellement j'aurais bien vu le film sur Schröder-Sonnenstern (25 min.) ainsi que celui de Bruno Decharme, probablement un des derniers que ce réalisateur par ailleurs collectionneur de l'association ABCD a dû réaliser, sur Hans-Jorg Georgi (12 min), ce créateur d'une escadrille de coucous déglingués qui avait beaucoup impressionné les visiteurs lors de l'exposition de la collection à La Maison Rouge récemment (en tout cas bien plus que les œuvres en diagrammes et autres numérologies prétendument "art brut" de la section "Hétérotopies").
Hans-Jorg Georgi, l'escadrille de la Maison Rouge, expo ABCD, ph (sur mobile pas terrible) Bruno Montpied, 2014 ; la scénographie était pour beaucoup dans le choc ressenti à la vue de ces maquettes faites de bric et de broc ; elle avait été réalisée paraît-il avec l'assentiment de l'auteur
00:11 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art populaire contemporain, Art singulier, Cinéma et arts (notamment populaires), Confrontations, Napoléon et l'art populaire | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : caroline bourbonnais, festival du film d'art singulier, association hors-champ, abcd art brut, bruno decharme, hans-georg georgi, hôtel impérial nice, friedrich schröder-sonnenstern | Imprimer
30/05/2015
Interprétations autour de "La Déchirure", tableau de Jean-Louis Cerisier
En dessous de ma récente note sur la Mayenne à l'œuvre, expo au musée d'art naïf Paul Kondas en Estonie, en réaction à la mise en ligne de la reproduction ci-dessous d'un tableau de Jean-Louis Cerisier, intitulée La Déchirure, nous avions pu lire un échange interprétatif entre "Isabelle Molitor" et mézigue, le sciapode. Je remets la reproduction, sa légende et l'échange tout à la suite.
Jean-Louis Cerisier, La Déchirure ; un billet de 1000 zlotys déchiré, allégorie d'un refus de la vénalité proposé par l'artiste?
Commentaires:
"La fille qui est censée déchirer le billet de banque - ô naïf Sciapode! - dans le tableau de J-L. Cerisier, s'y prend d'une drôle de manière. On croirait qu'on contraire, elle essaie de le recoller. Ce serait bien dans le genre de l'ami Jean-Louis...
En fait d'allégorie de la non-vénalité, regardez comment elle tient le fameux billet. Elle le prend par en bas, franchement, vous avez déjà essayé de déchirer un bout de papier en le tenant de cette manière? Ce n'est vraiment pas la manière la plus simple, ni la plus efficace...
Non, le Monsieur lui a tendu un billet déjà déchiré, et avec une tristesse bien compréhensible, elle se demande qu'est-ce qui, dans sa prestation, a pu lui déplaire pour qu'il la traite ainsi. Et elle essaie de recoller les morceaux, dans un geste certes un peu puéril (quand c'est déchiré, c'est déchiré), mais assez naturel."
Écrit par : Isabelle Molitor | 19/05/2015
Réponse:
"Ô Mame Molitordue, le mieux ne serait-il pas de demander à l'artiste ce qu'il a voulu dire par là (s'il a voulu dire quelque chose)?"
Écrit par : Le sciapode | 19/05/2015
Eh bien, un petit échange a suivi avec Jean-Louis Cerisier que je reproduis ci-dessous:
J-L. Cerisier :
“Pour La Déchirure comme pour nombreuses de mes peintures, la composition s'est faite de manière empirique : j'ai utilisé un vieux billet déchiré conservé dans mes archives, que j'ai collé en l'état, juste en accentuant la déchirure. Le tableau s'est construit à partir de cette induction, le personnage féminin, aux allures de pionnière (comme il en existait beaucoup à l'époque communiste) puis la table, puis les mains d'un personnage masculin, et le ciel pour finir. Ce mouvement de composition à rebours permet de laisser libre le champ de l'interprétation.
Parfois l'interprétation qui m'est donnée d'une de mes peintures agit comme une révélation. Ainsi le tableau Le rêve avait été composé de la même manière. Un ami me dit un jour qu'il y voyait un accouchement, ce qui ne m'avait pas traversé l'esprit.
Jean-Louis Cerisier, Imaginaires, le Rêve, huile sur panneau de bois, 39 x 49, 1983, donation ville de Laval (Musée d'Art Naïf et d'Art singulier), 2011
Un autre exemple, la peinture, Le déménagement a été créé à partir d'une peinture initiale représentant des billes d'agate. J'ai opéré une sorte de mise en situation, de mise en scène progressive qui a abouti au thème du déménagement, pas du tout prévu au départ.”
J-L Cerisier, Le Déménagement, huile sur toile, 41,5x27, 1999, collection privée
Bruno Montpied :
« Tu ne nous dis pas si, pour toi, la fille, dans le tableau La Déchirure, achève de détruire le billet ou tout au contraire tente de le recoller (comme l’interprétation de Dame Molitor le propose, en traitant finalement de vénale cette fille…)? »
J-L. Cerisier :
« Pour répondre à ta question : je prends une part dans l'interprétation par le titre que je donne au tableau, quand celui-ci est achevé. Pour celui-ci, la Déchirure, il est clair que ma lecture penche nettement du côté de la séparation du billet en deux. Pour tout dire, je trouve l'interprétation de Molitor tirée par les cheveux ! »
Comme quoi aussi, on peut déchirer les billets par le bas, Miss Molitor qui voyez de la vénalité un peu trop partout...
11:54 Publié dans Art immédiat, Art naïf, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jean-louis cerisier, le sciapode, isabelle molitor, interprétations d'images, musée d'art naïf et d'art singulier de laval | Imprimer
25/05/2015
Hommage à Caroline Bourbonnais, une exposition et un catalogue
Caroline Bourbonnais lisant une monographie sur Dubuffet de Max Loreau, visuel Fabuloserie © Philippe Couette
Couverture du catalogue de l'exposition d'hommage à Caroline Bourbonnais (1924-2014), visuel Fabuloserie
Du 18 avril au 2 novembre 2015, les héritières de Caroline Bourbonnais, Agnès et Sophie Bourbonnais, ont décidé de rendre un hommage appuyé à cette fondatrice, avec son mari Alain, disparu en 1988, de la collection de la Fabuloserie, un ensemble d'œuvres hors-normes conservé dans un bâtiment-labyrinthe, ainsi qu'autour d'une pièce d'eau, au sein du petit village de Dicy dans l'Yonne. Elles ont y été aidées par Déborah Couette, qui avait déjà réalisé, en compagnie d'Antoine Gentil et d'Anne-Marie Dubois en 2013-2014, juste avant la disparition de Caroline Bourbonnais donc, au musée Singer-Polignac, dans l'Hôpital Sainte-Anne à Paris une expo consacrée aux œuvres moins connues conservées dans les réserves de la Fabuloserie, "Un Autre Regard".
Le parc de la Fabuloserie autour de l'étang, avec à l'arrière-plan le manège de Petit-Pierre et sur la rive à droite des statues de Camille Vidal rescapées du démantèlement du site de ce dernier situé originellement à Agde dans l'Hérault, ph. Bruno Montpied, 2011
"Des Jardins imaginaires aux jardins habités, des créateurs au fil des saisons" est le titre d'une première exposition réalisée dans le cadre de cet hommage, et présentée dans le parc de la Fabuloserie ainsi que dans l'ancien atelier d'Alain Bourbonnais se situant à l'orée de ce parc (voir ci-dessous).
© Jean-François Hamon
Sa thématique est centrée sur les réalisations exécutées en plein air par un certain nombre de créateurs d'environnements spontanés, créateurs dont plusieurs fragments de leurs environnements se sont trouvés déplacés et sauvegardés dans le parc de la Fabuloserie, espace d'exposition caractéristique et original au sein de cette collection, la seule à posséder ainsi en Europe un musée de plein air consacré aux environnements d'art spontané (comme je l'avais déjà signalé dans mon ouvrage Eloge des Jardins Anarchiques en 2011). Voici la liste des créateurs exposés dans le cadre de cette première expo, avec pour ce qui concerne les autodidactes de culture populaire: Pierre Avezard, dit Petit Pierre, Giuseppe Barbiero (Joseph Barbiero), Jean Bertholle, Marcello Cammi, Jules Damloup, Marie Espalieu, Marcel Landreau, Gaston Mouly, Charles Pecqueur, François Portrat, Abdel-Kader Rifi, Robert Vassalo, dit Vlo, le Finlandais Alpo Koivumäki et Camille Vidal. En ce qui concerne les créateurs en plein air plus "artistes", on trouvera aussi des œuvres d'Alain Bourbonnais, de l'Indien Nek Chand, de Roger Chomeaux, dit Chomo, de l'ineffable Danielle Jacqui, du baba new age Jean Linard, de Vincent Prieur, de Raymond Reynaud, du Belge Jean-Pierre Schetz et de Tô Bich Haï.
Joseph Barbiero, sans titre, sans date, pierre volcanique 45 x 33 x 21 cm, coll. La Fabuloserie, © Jean-François Hamon (visuel Fabuloserie)
Des sculptures de Camille Vidal et sur le mur rouge, structure portante conçue par Alain Bourbonnais, des médaillons en mosaïque et ciment de François Portrat, dans le parc d'environnements de la Fabuloserie, ph. BM, 2011
Robert Vassalo, Tu vas l'exposer à Marseille les 29-30 aout 94, Robert - Oui à la "Galerie Ola" 16.500.000 FRS Bld d'HAIFA - Tu es ignoble, v.1994, gouache et encre sur papier, 20,5 x 31 cm, coll. La Fabuloserie, © Jean-François Hamon ; Vassalo n'était pas seulement l'auteur de sculptures installées à l'air libre mais il était aussi peintre (à noter que dans le catalogue on en apprendra plus sur lui grâce à une présentation de Roberta Trapani)
Vue de l'exposition actuelle d'hommage à Caroline Bourbonnais ; on reconnaît des pierres sculptées de Barbiero sur la table blanche et (peut-être...) des personnages créés par Bich Haï dans le fond derrière une vitrine
Les nouvelles animatrices de la Fabuloserie ne se sont pas arrêtées là. Elles proposent en effet une seconde exposition, la première d'un cycle d'expos à venir (centrées sur des créateurs emblématiques de la Collection), consacrée à l'un des "piliers" parmi les artistes singuliers de la collection, à savoir Francis Marshall, connu pour ses grandes poupées boursouflées et bourrées dont l'une, Mauricette, occupe avec beaucoup de présence une salle entière à la Fabuloserie, avec en vedette la nommée Mauricette. A noter qu'à la faveur de cette exposition, première d'un cycle intitulé "Parcours turbulents", une nouvelle collection, dirigée par Déborah Couette, voit paraître son premier titre consacré à Francis Marshall, accompagné d'un DVD d'un film évoquant le parcours de cet artiste. D'autres devraient suivre, à chaque fois consacré à un des créateurs connus ou inconnus, dont l'œuvre est conservée à la Fabuloserie. C'est en quelque sorte une revitalisation de l'ancienne collection d'ouvrages que l'Atelier Jacob, première aventure d'Alain et Caroline Bourbonnais menée dans le quartier de St-Germain-des-Prés à Paris, éditait avant que leur collection migre en Bourgogne à Dicy.
Francis Marshall, la nommée Mauricette
Plaquette sur François Monchâtre, de la collection Fabuloserie n°2, 1980 (on y annonçait l'existence de la Fabuloserie à Dicy)
Enfin, une troisième exposition est également mise en place, intitulée "Le temps des collections, Hommage à Caroline Bourbonnais", qui se décline tout au long du parcours de la visite dans les collections, les œuvres sorties des réserves et constitutives de cet hommage faisant l'objet d'une signalétique particulière. Les créateurs exposés dans ce parcours sont : un Anonyme, dit Pierrot le fou (qui était déjà exposé à "Un Autre Regard"), Renaud d’Ampel (Sic, ce dernier que j'orthographierais personnellement plutôt "Renaud-Dampel" - car cela paraît être son nom et Jacques son prénom - me semble être le même que celui dont on peut voir de magnifiques pierres peintes au Musée de l'Art en Marche de Luis Marcel à Lapalisse, voir ci-dessous), Guy Brunet, Gustave Cahoreau, Thérèse Contestin, Michel Dalmaso, Paul Duhem, Ted Gordon, Roger Hardy, Gérard Haas, Jeantimir Kchaoudoff, Aranka Liban, André Labelle, André Lécurie, Edmond Morel, Marilena Pelosi, André Robillard, Jean Tourlonias, Jacques Trovic et Jephan de Villiers.
Jacques Renaud-Dampel, pierre peinte exposée au Musée de l'Art en Marche en 2014, ph. BM
Une vue de l'intérieur de la Fabuloserie, avec quelques pièces de la collection, des Guivarch (les animaux en bas à droite), une enseigne de coiffeur en provenance d'Afrique de l'Ouest, à côté d'un tableau d'assemblage, semble-t-il, de Fernand Michel, de sculptures exécutées à la tronçonneuse de Jean Rosset(dans le fond), d'un bateau d'Emile Ratier(à gauche) et peut-être des pierres peintes du même Renaud-Dampel que dans l'illustration précédente, ph. BM, vers 2012
Et puis il y a aussi un catalogue à l'occasion de ces expos, avec réuni autour de l'évocation des multiples aspects du travail de prospection et d'enrichissement de la Fabuloserie un bel aréopage de personnes connues depuis longtemps ou bien depuis plus récemment pour leur engagement envers l'art brut, l'art populaire, l'art naïf, les environnements, l'art singulier et tutti quanti. Personnellement je me retrouve installé, pour évoquer mon vieux camarade Gaston Mouly (arrivé à la Fabuloserie en 89 parmi les premières nouvelles acquisitions de l'ère Bourbonnais avec Caroline en solo), entre Martine Lusardy (qui traite de Raymond Reynaud) et Céline Delavaux (sur Barbiero). Mais foin de beaux discours, autant vous donner le sommaire qui apparaît assez copieux:
Avant-propos, Agnès et Sophie Bourbonnais
Avant-propos, Roger Cardinal
Des jardins imaginaires au jardin habité, présentation de l’exposition, Déborah Couette
Territoires imaginaires dans la collection art hors-les-normes, Déborah Couette
Bâtisseurs et autres inspirés à La Fabuloserie :
Charles Pecqueur ou la féerie d’un mineur, Sophie Bourbonnais
La cathédrale de Marcel Landreau, Claude et Clovis Prévost
Le jardin extraordinaire de François Portrat, Anic Zanzi
Avec Chomo dans la tranchée des rêves, Jean-Louis Lanoux
L’Arche de Noé de Camille Vidal, Déborah Couette
Le Paradis Barbare d’Abdel-Kader Rifi, Déborah Couette et Antoine Gentil
P.Avezard, vacher à la Coinche, « un aire de musique avant la sortie », Pierre Della
Giustina
Raymond Reynaud ou le fantassin du mouvement perpétuel de la création, Martine
Lusardy
Gaston Mouly, un artiste rustique moderne, Bruno Montpied
Barbiero au pays des volcans, Céline Delavaux
Marie Espalieu à la croisée des chemins, Jean-Michel Chesné
La Petite Afrique de Jules Damloup, Michel Ragon et Sophie Bourbonnais
La Galleria dell’Arte de Marcello Cammi, Salade Niçoise ou Antipasti Bourguignon,
Sophie Bourbonnais et Pierre-Jean Wurtz
La maison de celle qui peint, Danielle Jacqui. A la démesure d’un rêve éblouissant,
Marielle Magliozzi
Le harem fantastique de Robert Vassalo, Roberta Trapani
Vincent Prieur le pinseyeur, Marie-Rose Lortet
Les girouettes polychromes de Jean Bertholle, Agnès Bourbonnais
Un élan venu de la forêt finlandaise d’Alpo Koivumäki, Raija Kallioinen
D’un jardin extraordinaire à un autre. De Chandigarh à Dicy, Lucienne Peiry
Le Coin au soleil de Jean-Pierre Schetz, Brigitte Van den Bossche
Les âmes errantes de Tô Bich Haï. Peintures, poupées et pieux, Tô Bich Hai et Sophie
Bourbonnais
Fabuleuse Caroline Bourbonnais
Fabuleuse Caroline, Laurent Danchin
Tu vois, Michèle Burles
La Fabuloserie, Musée des diables et des anges, Sepp Picard
Nos musées, souvenirs, Jacqueline Humbert
La grande Caroline de La Fabuloserie, Suzanne Lebeau
Lettre de réclamation d’affection, Francis Marshall
Merci Caroline, Pascale Massicot et Stéphane Jean-Baptiste
Caroline, Philippe Lespinasse
Caroline a rejoint Alain, Michel Nedjar
Le ciel peut bien attendre, Claude Roffat
La Fabuloserie comme spectacle, Jean-Pascal Viault
Dans le miroir des flaques du temps, Jano Pesset
Caroline chérie ou l’assurance modeste, Léna Vandrey
Un discours peu conventionnel pour une femme non conventionnelle, Rose-Marie
Vuillermoz
Hommage d’un chérubin charbonnier, Pascal Verbena
Annexes
Liste des créateurs exposés : Des jardins imaginaires au jardin habité
Listes des créateurs exposés : Le Temps des collections
Gaston Mouly dans son atelier en 1988, ph. BM ; au-dessus à gauche, on voit accrochée en bonne place son plus grand tableau (la vie au village de jour et de nuit) exécuté bien avant qu'il n'expose au Musée de la Création Franche et prouvant qu'il n'avait pas attendu Gérard Sendrey pour dessiner et peindre
12:24 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art populaire insolite, Art singulier, Environnements populaires spontanés, Hommages | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : caroline bourbonnais, des jardins imaginaires aux jardins habités, fabuloserie, habitants-paysagistes, inspirés du bord des routes, environnements spontanés, déborah couette, camille vidal, françois portrat, bich haï, gaston mouly, robert vassalo, francis marshall, jacques renaud-dampel | Imprimer
12/05/2015
Les Mayennais toujours à l'œuvre et à la manœuvre en Estonie
"Chers amis et contacts,
J'ai le plaisir de vous annoncer une nouvelle exposition de La Mayenne à l'oeuvre, organisée au musée Paul Kondas d'art naïf et outsider de Viljandi en Estonie, du 15 mai au 15 juillet 2015.
Article de Pauline Launay dans Le Courrier de la Mayenne du 6-5-2015
Un dessin de Robert Tatin, La Vierge aux Oiseaux, 1982, coll. Art Obscur
Jean-Louis Cerisier, un billet de 1000 zlotys déchiré, allégorie d'un refus de la vénalité proposé par l'artiste?
Gustave Cahoreau tenant une de ses sculptures, un "protégé" de Michel Leroux... Archives Art Obscur
Céneré Hubert, créateur multi-formes et notamment créateur d'environnement à St-Ouen-des-Toits (toujours en Mayenne), Archives Art Obscur
Un très beau dessin (pastel?) de Patrick Chapelière ; à noter que les trois créateurs ci-dessus s'apparentent davantage à l'art brut qu'à l'art dit singulier, tant leur travail s'accomplit dans l'écart vis-à-vis des démarches traditionnelles artistiques ; coll. Art Obscur
Alain Lacoste, autre Singulier mayennais bien connu et prolifique ; coll. Art Obscur
Marc Girard ; j'aime assez cette œuvre qui me fait penser à ... moi, mais aussi à Chaissac, à Lacoste...; coll. Art Obscur
Et un Joël Lorand, un... Peut-être relativement ancien, non? ; coll. Art Obscur
00:04 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art moderne ou contemporain acceptable, Art naïf, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : mayenne à l'oeuvre, jean-louis cerisier, viljandi, musée paul kondas, art naïf, art singulier, alain lacoste, marc girard, jacque reumeau, musée du vieux-château à laval, csn 53, jules lefranc, robert tatin, école de figuration poétique lavalloise, céneré hubert, environnements spontanés, patrick chapelière, art brut, joël lorand | Imprimer
08/05/2015
Monleme Gladys (c'est pas une jeune fille)
De passage à Lyon, le week-end du 1er mai dernier, j'ai fait un petit bonjour à mon galeriste préféré, l'ineffable Alain Dettinger qui, en dépit du black out des lieux fermés pour cause de pont du 1er mai, était resté ouvert, parce que pour lui il ne s'agit pas d'un travail mais d'une passion, de l'air qu'il respire chaque jour, quelle que soit l'actualité. Il y avait toujours autant de tableaux et d'objets, de photographies accrochés aux murs et surtout entassés au sol, bouchant toute l'arrière-boutique. En voilà un à qui on devrait donner un peu plus d'espace, tant son travail de découvreur et de défricheur de talents ressemble à une entreprise de salubrité publique. Car nos esprits ont autant besoin de remèdes que nos corps.
Il exposait les savants travaux d'équilibrisme en noir et blanc de Danielle Stéphane, je l'ai déjà signalé. Et comme toujours, en marge de son expo du moment, il y avait pour moi une autre découverte à faire. Alain Dettinger est un passionné d'Afrique comme on sait, c'est l'autre registre de sa galerie, parallèle à l'art plastique et graphique de singuliers contemporains. Il avait rencontré en compagnie d'une amie galeriste, située un peu plus loin de son échoppe (il est place Gailleton dans la Presqu'île à Lyon), à savoir la Galerie du Triangle, 33, rue Auguste Comte, un artiste béninois autodidacte (comme semblent l'être beaucoup de créateurs contemporains en Afrique noire), se présentant sous l'étrange prénom féminin de "Gladys". La Galerie du Triangle lui organise une exposition qui dure jusqu'au 16 mai.
Alain Dettinger pour sa part s'est contenté d'acquérir deux peintures de cet artiste, toutes deux signées plus complètement "Monleme Gladys". Il paraît vivre à Abomey, au Bénin, et créerait quelque peu dans l'orbite d'un autre artiste de là-bas, déjà pas mal "lancé", le dénommé Dominique Zinkpe, créateur d'un centre culturel, qui lui-même a parmi ses influences admises le peintre d'origine haïtienne Jean-Michel Basquiat. Et ce dernier, pour le côté peut-être un peu déstructuré de ses compositions paraissant souvent sur le point de se dissoudre, est sans doute une référence aussi pour notre Gladys.
Monleme Gladys, sans titre (un homme tient à bout de bras sa tête coupée, tandis qu'un autre homme le menace de sa lance), 83 x 87 cm, technique mixte (sur papier marouflé sur panneau de bois?), 2010, Galerie Dettinger-Mayer, Lyon, ph. Bruno Montpied
Monleme Gladys, sans titre (accouchement d'un serpent par le bas et accouchement d'un être humain par le haut...), 83 x 87 cm, technique mixte (sur papier marouflé sur panneau de bois?), probablement de la même année 2010 que le précédent, coll. privée, Paris ; ph. B M
Les deux compositions m'ont fait penser que l'homme doit en outre être inspiré par les mythologies propres à son pays, car en dépit du fait qu'elles sont assez sobres, tracées sur un fond uni quoique plein d'une matière graineuse, elles restent assez difficiles à interpréter pour un Européen peu au fait de ces mythes, ce qui est mon cas.
Détail d'un portrait de Gladys devant ses peintures, archives Alain Dettinger, 2015
Le problème, c'est qu'à côté de ces deux compositions-là, l'artiste en question paraît travailler parfois un peu plus vite, et peut-être de façon moins inspirée (afin de satisfaire à une commande qui le bouleverse ?). L'exposition de la Galerie du Triangle de mon point de vue révèle cet aspect préoccupant (car le fait de se montrer inégal peut desservir grandement un artiste, par la réputation qu'elle risque de lui tailler), même si dans l'ensemble on peut découvrir de fort belles choses en ce lieu courageux. Si un grand tableau sans titre au centre de l'expo reste de très belle facture (voir ci-dessous), ainsi que deux ou trois autres compositions sur panneaux, plusieurs dessins sur papier paraissent cependant moins frappants.
Gladys, sans titre, sans date (?), environ 1 m x 1 m (?), peinture sur panneau ou toile, exposition Galerie du Triangle, 2015 ; ph. BM ; c'est l'une des plus intéressantes œuvres de l'expo
Gladys, une autre de ses grandes peintures exposées Galerie du Triangle, elle aussi fort belle... ; ph. BM
Gladys, une de ses peintures sur papier datée de 2014; l'inspiration n'est-elle pas moins forte ici (personnages moins narratifs, posés platement côte à côte, seule la couleur paraissant avoir été traitée avec attention) ? Exposition Galerie du Triangle, 2015 ; Ph BM
Alors? Qu'est-ce qui explique cette différence d'inspiration et de graphisme entre les peintures de 2010 et les quelques œuvres de 2014 montrées en ce moment à Lyon? Mais il faudra sans doute attendre d'en voir davantage... Ce qui n'est pas sûr d'arriver quand on connaît le grand nombre d'artistes qui créent en Afrique, notamment de l'Ouest.
20:02 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Art Brut, Art immédiat, Art moderne ou contemporain acceptable, Art populaire contemporain, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : monleme gladys, gladys, art contemporain africain, art d'autodidactes africains, art immédiat africain, galerie dettinger-mayer, galerie du triangle, dominique zinkpe, jean-michel basquiat, mythologie individuelle | Imprimer
01/05/2015
La Mayenne à l'oeuvre
Me parviennent depuis quelques jours diverses annonces émanant des différents acteurs (liés à l'association CSN 53, "Créations Naïves et Singulières en Mayenne") d'une exposition à deux visages, "La Mayenne à l'œuvre", qui va être montée d'un côté au Centre Kondas d'Art Naïf et Outsider à Viljandi en Estonie (du 15 mai au 15 juillet ; l'expo est initiée plus particulièrement par Jean-Louis Cerisier qui entretient depuis des années des liens étroits avec certains de ses pays à l'est et au nord de l'Europe), et de l'autre en Mayenne, dans un joli village répondant au doux nom de Saint-Céneri-Le-Gérei.
Dans ce dernier patelin, l'expo durera trois jours, du 23 au 25 mai (c'est le week-end de la Pentecôte). Elle est constituée d'une petite partie de la collection de Michel Leroux, dite par lui "d'art obscur" (pas si obscur que cela tout de même ; à signaler que Michel Leroux a recyclé ainsi un terme qui avait été envisagé au début de l'aventure de l'art brut, vers 1945 donc, par Dubuffet lui-même qui l'avait finalement rejeté comme insuffisamment adapté à ce qu'il cherchait).
Patrick Chapelière, coll Michel Leroux
Noël Fillaudeau, sans titre, série des "Métamorphoses", vers 1993, coll. privée, Paris, ph. Bruno Montpied
Robert Tatin œuvre actuellement exposée (jusqu'en juin prochain) au musée Robert Tatin de Cossé-Le-Vivien (Mayenne)
Au programme: Gustave Cahoreau (un protégé de Michel Leroux), Patrick Chapelière (mis en avant par Joël Lorand), Alain Lacoste (un grand ancien de l'art singulier), Robert Tatin (qui en dehors de son musée sculpté de Cossé-Le-Vivien était aussi peintre), Joël Lorand (Mayennais d'adoption, et maintenant Sarthois (non... en fait habitant de l'Orne, voir commentaires ci-dessous...) à ce que j'ai cru comprendre, puisqu'il est basé à Alençon), François Monchâtre (un autre ancien de la Singularité, connu pour ses machines imaginaires et ses personnages de "crétins"), Noël Fillaudeau (l'ancien ami de Gaston Chaissac), enfin Jean-Louis Cerisier.
Jean-Louis Cerisier, Collection L'Art Obscur de Michel Leroux
Cette expo, en dehors de la collection de Michel Leroux, comprendra aussi des œuvres venues des ateliers de Serge Paillard et de Jean-Louis Cerisier, amis lavallois dont j'ai souvent eu l'occasion de parler sur ce blog. Des œuvres provenant de la collection Michel Basset, et de la collection Jean-François Maurice (récemment disparu), seront également adjointes à ces ensembles.
Serge Paillard, Pomme de Terre en Patatonie (la cartographie rêvée du Professeur Caldnitz), 2015?, collection de l'artiste
08:08 Publié dans Art immédiat, Art naïf, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : csn 53, centre kondas de viljandi, art naïf, art singulier, patrick chapelière, la mayenne à l'oeuvre, art obscur, michel leroux, jean-louis cerisier, serge paillard, noël fillaudeau, alain lacoste, joël lorand, viljandi, estonie | Imprimer
25/04/2015
Un artiste à découvrir: Bernard Briantais
Rencontré à Carquefou pour une expo au Manoir des Renaudières (Ruzena-Branciard), Bernard Briantais m'avait d'abord frappé par sa physionomie sympathique, truculente et atypique (voir ci-contre, ph. Bruno Montpied). Je le lui avais dit.
Bernard Briantais, pas de titre? Dimensions? Date?
Il est artiste et à l'époque peignait beaucoup de trognes et visages avec un luxe de graphismes et de formes à l'originalité improbable, étant donné les innombrables œuvres d'art qui se sont déjà attaquées aux visages des hommes.
Bernard Briantais, sans titre ? Dimensions? Mars 2014
On pouvait s'en faire une idée en allant visiter son site web, où en exergue on trouve cette maxime sympathique: "Ne demande jamais ton chemin, de peur de ne pouvoir te perdre!".... Cependant, malgré cette surprise initiale, j'étais resté sur mon quant à soi, demandant au fond à voir venir, comme on dit. Et le voici qui débarque à Paris, suite à une adresse que je lui avais donnée. Au 102, boulevard de la Villette dans le 19e ardt de la capitale, dans la légendaire galerie L'Usine que dirige d'une main de velours dans un gant de fer Claude Brabant. "Légendaire", enfin, pour les happy few... car cet espace dédié aux nouveaux talents depuis des décennies est toujours resté en dehors des clous et des regards médiatiques, et donc, il se peut fort bien que vous n'en ayez jamais entendu parler.
Bernard Briantais, sans titre, dimensions ? Date?
Sur le carton d'invitation, est reproduit un dessin fort séduisant, prouvant que Bernard Briantais est tout à fait à même de raconter aussi des histoires en images et qu'il ne se contente pas d'interroger les faces plus ou moins brouillées de ses contemporains. D'ailleurs dans la galerie de son site web, sont apparus des travaux probablement récents qui montrent d'autres orientations inédites de sa recherche picturale qui prouvent que l'homme n'a pas qu'une corde à son arc.
Bernard Briantais, sans titre? Dimensions, date?
Bernard Briantais, sans titre? Dimensions, date?; dans cette composition une forme "en capsule" apparaît, enveloppant les personnages comme un linceul, forme que l'on retrouve dans d'autres compositions, mais isolées, et quasi vides, semblables à des fantômes errant parmi les vivants...
Autre chose qui me plaît dans ce travail, déjà remarquée chez un autre Bernard, artiste contemporain discret, Bernard Thomas-Roudeix, on trouve là un goût pour le grotesque humain mais qui ne s'accompagne d'aucune misanthropie. On est dans le constat, peut-être dans la perplexité devant ce que renvoient nos frères en humanité, reflets de ce que nous sommes et de nos propres apparences sans doute. On n'est nullement dans une haine de l'humain qui s'exprimerait par une complaisance à représenter des êtres de la façon la plus vile, comme des écorchés bons à passer à la marmite... (je pense aux peintres style Rustin et compagnie qui sont si à la mode ces temps-ci).
Bernard Briantais, sans titre? Dimensions, date? ; ici apparaît justement une de ces formes blanches enveloppées, semblable à un fantôme
M'est avis que les Parisiens amateurs de curiosités et d'images nouvelles ont intérêt à se déplacer pour le coup. Le vernissage aura lieu le samedi 9 mai de 18h à 21h.
Bernard BRIANTAIS, Exposition dessins-peintures. Du 9 au 21 mai 2015. L’usine, 102 bd. de la Villette, 75019 Paris. T: 01.42.00.40.48. et <usine102.fr>. Ouvert sur rendez-vous. M° Colonel Fabien.
11:44 Publié dans Art moderne ou contemporain acceptable, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : bernard briantais, galerie l'usine, claude brabant, carquefou, manoir des renaudières, art contemporain singulier, fantômes | Imprimer
19/04/2015
Infos-miettes (26)
Solange à Bruxelles
Solange Knopf s'en vient à Bruxelles exposer à nouveau, cette fois hébergée par deux passionnés de son travail, Clem et Claude Jadot. L'exposition a une durée météorique, deux jours seulement, les samedi 9 et dimanche 10 mai (de 14 à 19h), le vernissage se passant le vendredi 8 mai de 18 à 22h. Voici l'adresse pour ceusses qui aimeraient y faire un tour: 77, Drève des Renards, Uccle, Bruxelles.
Solange Knopf, sans titre, 109 x 79 cm, crayons de couleur sur papier en fibre de bambou, 2015 ; Ph Luc Shrobilgten
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Galerie Isola de Francfort, de l'art brut en Allemagne: Ernst Kolb
La galerie Isola à Francfort, dirigée par Patrick Lofredi, un Français installé en Allemagne, galerie qui était présente au récent salon outsider art fair de Paris à l'Hôtel le A, présente actuellement une exposition sur un nouveau venu dans le champ de l'art brut, Ernst Kolb, à l'occasion de la sortie d'un livre de Rolf Bergmann consacré à ce créateur. Cela dure du 3 avril au 24 mai. Adresse: Falkstraße 40, 60487 Francfort. Tel 01 57 34 92 23 72. Ils ont un site web bien sûr: http://www.galerie-isola.de/. L'art brut en Allemagne est un terrain très peu connu en France, n'est-il pas?
Ernst Kolb, portrait et dessins, photo extraite de www.outsider-art-brut.ch
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Et toujours le musée d'art brut et naïf de Suisse orientale, le "museum im Lagerhaus" (l'Entrepôt) à Saint-Gall qui présente cette fois une collection privée...
Alfred Leuzinger (1899-1977), Homme avec coléoptères (autoportrait), crayons de couleur sur papier, © Museum im Lagerhaus, Collection Mina und Josef John
Du 21 avril au 18 Octobre 2015 (ouverture le 20 avril), se tiendra une exposition consacrée à la collection de Mina et Joseph John avec environ 650 œuvres d'art brut ou populaire suisse. Il semble que cette collection soit ouverte au public en dehors de cette manifestation. Parallèlement à l'expo, le musée Im Lagerhaus présente dans sa documentation un aperçu de la collection complète (de même sur son site web, on peut découvrir des reproductions de l'ensemble de cette collection mise en ligne!). J'avoue avoir toujours eu un petit faible pour ce musée caché dans l'Appenzell qui nous montre si souvent du nouveau et du plus délectable en matière d'art brut, naïf ou populaire. Dommage que ce ne soit pas ma banlieue...
Ernst Kummer (1918-2003), maquette d'avion avec personnage, matériaux variés, sans date © Museum im Lagerhaus, Collection Mina und Josef John
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La galerie Les Yeux Fertiles a des obsessions
Là, l'exposition intitulée "Obsessions", n'en a plus que pour quelques jours, puisqu'il est prévu qu'elle se termine le 16 mai. Parmi plusieurs noms relevant de l'art moderne (Bellmer, Saby, Fred Deux, Molinier...) ou de l'art singulier (inévitable Ody Saban...) dont les œuvres sont exposées, on signalera trois magnifiques peintures d'Eugen Gabritschevsky, qui devrait être bientôt exposé en plus grand à la Maison Rouge (vers la fin de l'année), d'après ce que nous en a dit Benoît Morand l'un des animateurs de la galerie. Ainsi que la peinture de Lubos Plny, moins chargée qu'à l'habitude et formidablement équilibrée, qui a été choisie pour le carton d'invitation. Et un très beau André Masson également (à quand une rétrospective de cet artiste qui paraît moins chéri des commissaires d'exposition que d'autres du mouvement surréaliste?)... Liste complète des exposants: H. Bellmer, J. Benoît, F. Deux, J. Domsic, J. Ferrer, J. Fischer, E. Gabritschevsky, G. Harloff, E. J. Hodinos, V. Jakic, I. Jarousse, J. Kolar, R. Léonardini, S.Lepri, R. Lonné, M. Macréau, A. Masson, P. Molinier, M. Pelosi, L. Plny, O. Saban, B. Saby, Scottie-Wilson.
Lubos Plny, sans titre, 83 x 59,5 cm, encre de Chine et acrylique sur papier, 2008
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"Ligabue et les visionnaires candides" au Centre Miche Berra de Costigliole Saluzzo (région de Coni, Piémont)
Ça doit être bien joli ce patelin de Costigliole Saluzzo, situé au sud de Turin, au pied des Alpes (du côté français, il y a le Queyras), où est montée une exposition (du 28 mars au 5 juillet) que j'aurais bien aimé voir... Hélas, elle se terminera juste au moment de la grande transhumance des vacances. Ligabue, ce peintre naïf connu pour ses tigres aux gueules féroces, n'est pourtant pas bien connu hors d'Italie et pas souvent exposé.
Antonio Ligabue, un de ses tigres féroces
Cette année, c'est le cinquantième anniversaire de sa disparition. Avec lui, on a joint des œuvres de Ghizzardi, lui qui fut exposé à Nice et à Paris il n'y a pas si longtemps, et de Bruno Rovesti. A côté sont aussi présentés quelques artistes naïfs yougoslaves Generalic, Rabuzin, Vecenaj, Lackovic et Kovacic qui m'attirent moins (hormis Rabuzin).
Un document tourné par Raffaele Andreassi en 1962, assez étonnant je trouve, Ligabue, il vero naïve, de 1977 pour la RAI semble-t-il, où l'on voit Ligabue en action, cherchant à imiter des bruits d'animaux (je crois...) et trouver l'amour auprès d'une dame qui paraît charitable à son égard, sans plus...
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Louis Soutter confronté à Victor Hugo dans le musée de la Place des Vosges
"Dessins parallèles" est le sous-titre de l'expo (prévue pour durer du 30 avril au 30 août) des dessins des deux grands artistes amants du noir et du charbonneux. On connaît les encres de Hugo, ses paysages visionnaires, ses personnages grotesques, ses pochoirs, ses taches interprétées, mais un peu moins les peintures tracées aux poings et aux doigts par le Suisse Soutter.
Louis Soutter, Parvis, encre noire, 1937, © galerie Karsten Greve, Cologne, Paris, St-Moritz
Je ne sais pas encore si ce sont ces dernières du reste qui seront au musée Victor Hugo, je me contente de l'espérer car le carton d'invitation que j'ai reçu en montre une, ce qui paraît inférer qu'il y en aura d'autres place des Vosges. C'est ce que je préfère dans l'œuvre de Soutter, ses dessins au trait me lassant davantage. Ses peintures aux poings, parfois d'une sobriété étonnante et sans perdre pour autant de leur force, ont marqué d'après moi certains artistes singuliers suisses comme par exemple Christine Sefolosha (à ses débuts) ou François Burland.
Un Soutter (le Héros)exposé il y a peu (2012) à la Maison Rouge, provenance galerie Karsten Greve là aussi...
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Guy Girard, Jean-François Affre, Christian Martinache
Vous ne trouverez pas beaucoup de renseignements sur le Net sur ces trois compères-là qui se sont alliés pour exposer à la galerie Artcomplice (11, rue Petit dans le 19e ardt, Paris ; tél: 01 40 41 97 77 et 06 70 06 31 88) du 15 au 27 avril (plus que quelques jours donc). Personnellement, je me suis souvent intéressé aux peintures du premier qui a exposé autrefois au musée de la Création Franche à Bègles et que j'ai souvent évoqué sur ce blog.
Guy Girard, anagraphomorphose sur le paraphe de Flora Tristan, huile sur toile, musée de la Création Franche, ph Bruno Montpied (2009)
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Du côté de la Galerie Dettinger, Danielle Stéphane
Nouvelle exposition à Lyon, place Gailleton, d'une artiste qui paraît sûre de ses moyens quant à la représentation de personnages, dans des compositions apparentant ses scènes de cirque à des constellations de formes blanches sur des fonds sombres, le tout dans un trait poudreux.
Danielle Stephane, Lola au cirque, 110 x 72 cm, encre sur papier, 2014, ph Claire Defosse
Cela s'appelle "Variations Lola, encre sur papier" et c'est du 11 avril au 9 mai, en partenariat avec la galerie Jean-Louis Mandon, (3, rue Vaubecour dans le 2e ardt) où une autre exposition intitulée "Nymphes et vanités, encre sur volume" est montée en parallèle (du 7 avril au 25 avril, plus que très peu de temps...).
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"Wild Garden" (Jardin sauvage), art naïf et brut venu d'Iran à la Galerie Hamer, Amsterdam
J'ai déjà mentionné quelques créateurs bruts venus d'Iran, tous aussi originaux et talentueux les uns que les autres. On retrouve dans cette expo Davood Koochaki qui fut exposé déjà à la galerie Hamer ainsi que récemment à Paris dans le cadre de "Sous le vent de l'art brut II" (sur la collection néerlandaise du De Stadshof), mais cette fois associé à trois autres artistes moins connus, Mohammad Ariyaei, Salim Karimi et Gorgali Lorestani.
Mohammad Ariyaei, sans titre, 70 x 50 cm, Galerie Hamer, Amsterdam, Pays-Bas
Il semble que le point commun unissant les travaux de ces quatre créateurs est de n'avoir point totalement coupé par leurs sujets avec leur culture autochtone, un peu comme dans le cas de certains créateurs aborigènes australiens, ou des peintres de diverses ethnies en Inde. Ils font davantage preuve d'originalité par le style de leurs dessins ou peintures.
Deux pages du dépliant annonçant l'exposition à la galerie Hamer avec deux œuvres de Gorgali Lorestani, où l'on voit la présence très importante des textes mêlés aux graphismes
L'exposition durera du 22 avril au 23 mai. Voir www.galeriehamer.nl
16:14 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art populaire insolite, Art singulier, Confrontations | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : solange knopf, museum im lagerhaus, galerie isola, patrick lofredi, ernst kolb, collection mina et joseph john, alfred leuzinger, ernst kummer, art brut et naïf suisse, lubos plny, galerie le syeux fertiles, eugen gabritschevsky, andré masson, ligabue, rovesti, ghizzardi, art naïf visionnaire, soutter, victor hugo, art brut iranien, galerie hamer, mohammad ariyaei, gorgali lorestani, davood koochaki | Imprimer
05/04/2015
"Brut de pop'" dans les Landes
J'ai appris un peu à la dernière minute, et avec très peu d'informations sur le contenu de l'exposition (ainsi que sur la totalité des auteurs présentés)... qu'une manifestation commençait le 1er avril à l'Ecomusée de Marquèze (fin prévue le 28 juin) près de Sabres dans les Landes (entre Bordeaux et Mont-de-Marsan ; le titre est un calembour bien entendu, on veut nous faire songer à "brut de pomme"... Et l'on joue aussi en sous-titre sur les rapports de l'art brut avec l'art populaire en posant la question de "l'impopularité" hypothétique de ces formes d'art).
Le musée de la Création Franche de Bègles est associé à l'exposition par le prêt de pas moins de deux cents œuvres. Ils sont généreux à Bègles, faut pas le nier. Mais qui est exposé, c'est la question à mille francs ? Il semble qu'il n'y ait pour l'instant aucun dossier de presse de disponible, et l'on en est donc réduit aux supputations. Un catalogue, sous la forme d'un numéro spécial de Création Franche, devrait cependant, en principe, sortir la semaine prochaine. Les amis Albasser m'ont informé de plus qu'il y a deux douzaines d'œuvres de Pierre Albasser d'accrochées dans une section consacrée à la "récupération" (on les apercevait, à un moment d'internet, en illustration d'un communiqué de l'Ecomusée, présentées sous des cadres vitrés suspendus). Il semblerait aussi qu'on puisse aussi y trouver des pièces de Simone Le Carré Galimard, si le masque sur l'affiche est bien d'elle... A côté de l'affichette ci-dessus, on aperçoit aussi une de ces charmantes sculptures ultra brutes de décoffrage de Jean Dominique (sur lequel, je profite de l'occasion, est paru il n'y a pas si longtemps un ouvrage entièrement consacré à sa vie et son œuvre – avec une centaine de sculptures reproduites – livre écrit et autoédité par Jean-Luc Thuillier, Jean Dominique, une figure de l'art brut en Périgord, 2012). Le musée de la Création Franche possède en effet une cinquantaine de pièces de cet auteur.
Deux petites sculptures de Jean Dominique, musée de la Création Franche, ph. Bruno Montpied
Mais pour le reste? On ne peut que faire des suppositions en attendant qu'on trouve le temps de nous en dire plus ou que je rencontre quelque motorisé qui voudrait bien m'emmener là-bas... Le laïus du communiqué déjà évoqué indique: "Objets du quotidien détournés, art du bricolage et de la récupération, cette exposition propose de découvrir des objets aussi insolites qu’esthétiques, mais aussi de s’interroger sur les principes de la création artistique, qu’elle soit populaire, brute ou franche.
Anonymes, artisans, artistes, les créateurs rassemblés ici offrent une vision esthétique du monde loin des « beaux-arts » et des cercles académiques. Pour vous en faciliter la découverte, nous avons regroupé ces objets et œuvres autour de sept thématiques : l’artiste-artisan, le monde rural, le foyer, le religieux, l’enfance, les fêtes et les loisirs, la récupération."
Il semble donc que l'on veuille – dans un écomusée, c'est dans la logique des choses – associer l'art brut, et la création singulière d'artistes en porte-à-faux avec l'art des "Beaux-Arts" d'un côté (ce qui fait le fonds du musée de la Création Franche), avec, d'autre part, l'art populaire au sens rural du terme (tel qu'il a été conservé en tout cas dans ce musée consacré à la culture populaire landaise¹). Pour illustrer ce dernier aspect, il semble que l'Ecomusée ait décidé de mettre des éléments de sa collection (statues, œuvres de patience, meubles, gourdes en calebasse gravée, jouets...) en regard des œuvres venues de la Création Franche. Il faut préciser du reste que c'est une responsable de l'Ecomusée, Mme Vanessa Doutreleau, chargée des expositions au Pavillon de Marquèze, qui a choisi les 450 œuvres (au total) de "Brut de Pop'". J'applaudis en principe à ce genre d'initiative qui permet de réassocier art d'autodidactes bruts ou naïfs et art populaire, loin de l'art moderne ou contemporain (le rapprochement avec ces derniers, comme je l'ai déjà dit, se fait en effet par trop depuis quelque temps dans les cercles plus mondains de la capitale). Plutôt que de conserver une collection d'art brut dans un musée d'art contemporain et d'art moderne, on aurait pu tout aussi bien imaginer la voir entrer dans le prolongement d'un musée d'art populaire, comme c'est presque le cas lorsqu'on découvre en Bourgogne dans un même triangle géographique (j'avais appelé celui-ci autrefois, en 1989..., le "triangle d'or") le musée d'art naïf de Noyers-sur-serein, le musée d'art populaire de Laduz et la Fabuloserie de Dicy...
Une vue fort partielle de l'expo
Il faut souligner ce que ce projet a de tout à fait plausible et stimulant, à l'heure où certaine galerie parisienne et certain grand collectionneur voués à l'art brut aiment à mettre en avant ce qui relève à l'intérieur du champ de l'art brut plutôt du document ou de hautes élaborations intellectuelles pondues par des êtres cultivés en rupture, élaborations débouchant sur des chinoiseries cérébrales proches en terme d'ennui de tant d'œuvres de l'art contemporain le plus emmerdant (je pense au secteur dit "des hétérétopies scientifiques" de la dernière exposition ABCD à la Maison Rouge).
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¹ On pourrait renvoyer au fait les responsables de ce musée à l'information que j'ai délivrée il y a déjà quelque temps sur ce blog à propos d'Alphonse Benquet, ce peintre et sculpteur landais qui vivait dans les décennies du début XXe siècle à Tartas, non loin de Mont-de-Marsan dont est proche Sabres.
12:37 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art populaire insolite, Art singulier, Confrontations, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : écomusée de marquèze, musée de la création franche, art populaire des landes, art brut, art singulier, brut de pop', albasser, jean dominique, édition jean-luc thuillier, enfance, art sans artistes, création franche | Imprimer
15/02/2015
Trois récentes publications de l'auteur de ce blog (pour mon fan-club, si j'en ai un)
J'ai omis, pour mon auto-promotion – et désolé si ça fait grincer quelques dentitions peu amènes à mon encontre – de signaler trois de mes récentes publications. Pour mon fan-club, si du moins mon imagination narcissique a raison de me le suggérer, cela peut avoir son importance. Et puis ce blog sert aussi à ça.
Solange Knopf, Astral Odyssey (n°2), technique mixte sur papier, 72,8 x 55 cm, 2014 ; exposé à l'Inlassable Galerie (voir ci-dessous)
En un, je signale donc la publication dans le dernier numéro de Création Franche, le quarante-et-unième de la série (décembre 2014), d'un entretien de mézigue avec l'artiste belge Solange Knopf dont je vous ai déjà causé il y a peu ici et là. La revue nous a fort bien servis, nous consacrant plusieurs pages. Solange Knopf se dévoile un peu dans cet entretien exécuté par correspondance. "Un peu" parce que c'est là l'interview paradoxale d'une taiseuse.
Elle est par ailleurs actuellement exposée à Paris dans l'Inlassable Galerie rue de Nevers dans le VIe ardt (expo collective "L'autre intérieur", en compagnie de Guylaine Bourbon, Josette Exandier, Marcella Barceló, et l'abbé Coutant (l'erreur de casting de cette manifestation, parce que ce n'est pas parce qu'il fut en relation avec Chaissac qu'il fut automatiquement aussi inspiré que lui...), qui se déroule du 7 février au 16 mars ; 13 rue de Nevers, tél: 06 71 88 21 14 et 06 20 99 41 17).
En deux, je dois également signaler le n°33 de la revue Cultures et Sociétés (janvier 2015), édité chez Téraèdre/L'Harmattan où, sur la demande de Patrick Macquaire, pour un dossier qu'il y a constitué, "L'homme ou le travail à toutes fins utiles?", j'ai glissé un article intitulé "La retraite aux flambeaux", sous-titré "Les environnements populaires spontanés". J'y parle bien évidemment du moment souvent partagé par plusieurs créateurs d'environnements lorsque la prise de la retraite peut devenir traumatisante.
On se retrouve brutalement désocialisé, devenu inutile, comme plus bon à rien pour les autres. Et c'est parfois ce moment-là que certains anciens travailleurs choisissent pour se révéler créatifs, prenant le contrepied de leur mise au néant. Comme Picassiette qui avait œuvré pour sa part en opposition avec le cimetière de Chartres où il s'était trouvé employé. On m'a mis parmi les morts, vous allez voir ce que je peux faire pourtant... La retraite, autre petite mort, est ainsi grosse d'une possible renaissance. La société accorde aux travailleurs enfin l'occasion de vaquer à leurs occupations personnelles, au moment où leurs forces commencent à faiblir, c'est alors le moment de montrer ce que l'on est encore capable d'accomplir d'épanouissant et de créatif! C'est ce que ne manquent pas de faire nos créateurs d'environnements bruts ou naïfs. A noter que dans ce texte, j'annonce le projet en cours de la publication de mon inventaire des sites français d'art brut en plein air (le tapuscrit a été rendu, les options de financement sont à l'étude (comme on dit), et l'on a bon espoir...).
Pour acquérir le numéro (16 euros), écrire à L'Harmattan, 16 rue des écoles, 75005 Paris.
En trois, il s'agit d'une toute autre publication, cette fois nettement plus littéraire (quoique), un texte de souvenir relatif au XIe arrondissement qui fut longtemps un de mes arrondissements préférés dans Paris, tant qu'il resta populaire, lié aux artisans en tous genres.
Il me semble que cet aspect commença de changer vers 1986, à peu près au moment où l'on détruisit l'ancienne gare de la Bastille pour y mettre à la place la gigantesque molaire de l'Opéra. C'est à cette date que je déménageai du XIe pour aller dans le XVIIe puis très peu de temps après dans le XVIIIe. "Souvenirs de la Onzième Case", texte illustré de photos noir et blanc de José Guirao, avec qui j'écumai à un moment les rues entre la Roquette et Charonne pour garder traces de quelques paysages urbains appelés à disparaître (il vendit ensuite certaines photos à la Bibliothèque Historique de Paris), "Souvenirs de la Onzième Case" donc a été publié dans le n°6 de la revue de Anne Guglielmetti et Vincent Gille, justement nommée Mirabilia, numéro placé cette fois sous le thème du Temps, précisément...
Pour prendre davantage connaissance de la revue et de ses anciens numéros, pour consulter le sommaire de ce n°6, pour l'acquérir, il suffit de se reporter au site de la revue, ici même ou encore là. On la trouve également dans plusieurs librairies à Paris, notamment dans l'excellente librairie de la Halle Saint-Pierre, rue Ronsard, au pied de la Butte Montmartre (XVIIIe ardt).
Photo José Guirao, vers 1986, (il me semble qu'elle fut prise dans le Passage de la Main d'Or), publiée dans Mirabilia 6
Une autre de José Guirao (vers 1986), non retenue dans l'édition de Mirabilia, "faute de place", parce qu'il faut bien qu'on en enlève une, et ce fut celle-ci, etc... ; moi, j'y vois un autocar en ruine
00:09 Publié dans Art singulier, Environnements populaires spontanés, Littérature, Paris populaire ou insolite, Photographie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : revue création franche n°41, solange knopf, bruno montpied, cultures et sociétés n°33, patrick macquaire, environnements spontanés et retraite, mirabilia, josé guirao, paris populaire, photographie | Imprimer
24/01/2015
Appel de la famille de Gaston Mouly
Travail de mémoire sur l’œuvre de Gaston Mouly
Gaston Mouly, notre père ou grand-père, a produit des œuvres pendant plus de 15 ans en grand nombre et de toutes sortes (sculptures, dessins, pyrogravures…) et de toutes tailles (de la galette à la sculpture monumentale). Et chacun sait qu’il fut reconnu pour sa créativité et son travail. C’est en 1997 qu’il nous a quittés en nous laissant cette œuvre considérable, mais en grande partie dispersée.
Nous jugeons aujourd’hui nécessaire d’engager un travail pour la recenser et la sauvegarder.
Celui-ci débute par la recherche de lieux ou de personnes ayant en leur possession ses œuvres et acceptant de nous en transmettre les références (titre, date, matériaux, description) accompagnées de visuels.
Aussi, nous sollicitons les potentiels détenteurs d’œuvres de bien vouloir se manifester auprès de sa petite-fille Doriane Mouly pour permettre la réalisation de ce catalogue raisonné.
Votre aide nous est précieuse, et nous vous en remercions très sincèrement par avance.
Doriane Mouly
PS: Pour contacter Doriane Mouly, prière de passer par l'adresse de ce blog, en privé donc. Deux moyens de trouver l'adresse: 1 Vous cliquez à droite en haut de la colonne de droite sur "Me contacter". Par ce moyen vous ne pouvez envoyer que du texte dans vos messages. 2. Autre solution, vous cliquez sur "A propos". S'ouvre alors une page qui contient "l'éditorial" de ce blog. A la fin de ce texte d'intention, vous trouvez une adresse e-mail du blog. Vous pourrez alors joindre à vos messages des visuels en pièces jointes. L'animateur du blog répercutera vers la famille Mouly.
Gaston Mouly, Soldats écossais s'exerçant à l'escrime à la baïonnette 1917/ Observoitoire (sic) anglais dans un moulin 1917, Crayons de couleur sur papier Arches, 46x61 cm, vers 1989 (photographié à Lherm en 89), coll. Bruno Montpied
Gaston Mouly, Sans titre (le Chabrot), crayons de couleur sur papier Arches, 46x61 cm, vers 1989, coll. BM
13:05 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gaston mouly, doriane mouly, recensement de l'oeuvre de gaston mouly, art rustique moderne, art singulier, guerre de 14-18, chabrot | Imprimer
05/12/2014
Alain Dettinger invite Solange Knopf à Lyon
L'œuvre produite sous le signe du merveilleux par Solange Knopf poursuit son bonhomme de chemin en atterrissant cette fois à Lyon, place Gailleton, dans le cadre d'une exposition intitulée "Animus/Anima", organisée par la galerie d'Alain Dettinger, qui est comme on le sait consacrée sur deux rangs à "l'art primitif" (essentiellement africain) et à "l'art contemporain" (au sens où celui-ci, Darnish, désigne bien l'art d'aujourd'hui et non pas "l'art communicationnel" à la François Pinault et autres grands argentiers du moment).
Solange Knopf, carton d'invitation à l'exposition de la galerie Dettinger
Cela durera du 5 décembre 2014 au 3 janvier 2015. Dans le même temps, signalons qu'on trouvera dans le dernier numéro 84 de la revue internationale (anglophone) Raw Vision un article sur Knopf, rédigé par Edward B. Gomez, tandis que moi-même livrerai bientôt dans le n°41 de la revue Création Franche, prévue probablement pour la fin de cette année, une interview de la même Solange.
Série Behind the darkness, coll. privée, Paris
Série Botanica, coll. privée, Paris
Solange Knopf entretient des parentés stylistiques (c'est en effet plus la forme qui l'apparente que le contenu) avec des créatrices telles Guo Fengyi ou Josefa Tolra (cette dernière aura des dessins bientôt exposés à la Halle St-Pierre à partir du 21 janvier dans le cadre de la prochaine expo consacrée à la revue Les Cahiers Dessinés). Poudreuses traces d'un imaginaire qui surgit sur le papier à la limite du mirage, car on a parfois l'impression devant ces dessins qu'ils sont en instance d'évanouissement. La galerie d'Alain Dettinger, qui repère tant de créateurs originaux depuis des lustres, ne pouvait passer à côté de cette créatrice à l'univers séduisant, et donc en cette fin d'année, il faut faire le voyage de Lyon...
Solange Knopf, série Behind the darkness
A signaler le site web de Solange Knopf que j'ai oublié d'ajouter à cette note, comme me le rappelle le commentaire ci-dessous de la mère Molitor. On peut y découvrir nombre d'autres reproductions du travail knopfien et des images du vernissage qui a eu lieu jeudi 4 décembre
10:01 Publié dans Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : galerie dettinger-mayer, solange knopf, art contemporain, art communicationnel, raw vision, revue création franche, josefa tolra, art singulier, behind the darkness | Imprimer
01/12/2014
Marie Audin revient au musée de la Création Franche
Du 5 décembre 2014 au 1er février 2015, on pourra aller découvrir les petites œuvres faites selon la technique du pricking, mise au point par la créatrice, Marie Audin (-ex Marie Adda), au musée de Bègles. Une centaine d'œuvres sont accrochées, en même temps que se tient une seconde exposition parallèle d'Albert Louden (gros bonshommes en apesanteur...), sujet britannique, comme une moitié de Marie Audin, dont la mère était anglaise. J'ai déjà présenté cette créatrice, complète autodidacte, dont le métier est dermatologue, ce qui a un rapport étroit avec ses réalisations (qui a dit que les éléments biographiques n'avaient aucune importance pour comprendre une œuvre artistique?). C'était dans Création Franche n°33, en 2010 ("Marie Adda: sous la peau des images"), suite à ma découverte de ses œuvres exposées déjà à Bègles (c'est ce musée qui l'a révélée en 2009 ; de même que c'est sa visite qui quelques temps auparavant avait révélé à Marie les différentes formes d'expression affranchies de l'art académique qu'il contient, réveillant en elle le désir de reprendre des velléités créatrices qui s'étaient alors rendormies).
Marie Audin, un de ses prickings, avec inscriptions, "Help", "Hope and glory", "Don't give up the fight!", ph. Bruno Montpied, 2014
Marie joue avec des supports qu'elle chipe la plupart du temps dans les restes de matériaux qu'elle manipule à son travail, elle les piquète (d'où le mot anglais de "pricking") à l'aide d'aiguilles et de seringues. Dessous-dessus, et dessus-dessous. Cela ne donne pas les mêmes trous. Parties depuis le dessus, les perforations ont des bords légèrement boursouflés qui les apparentent aux pores de la peau, ou à une chair de poule. L'aiguille ayant traversé depuis le dessous, les trous s'apparentent à de simples points (J'ai rappelé dans mon article de 2010 que Marie avait gardé un brillant souvenir d'avoir admiré des tableaux de Seurat et Signac... Des pointillistes comme de juste!).
Marie Audin, sans titre, deux personnages affrontés, pricking et broderie, aquarelle, ph BM, 2014
Marie Audin, sans titre, composition aquarellée, brodée et pricking, ph BM, 2014
Marie Audin, sans titre, composition abstraite, par pricking, ph BM, 2014
Ses compositions sont tantôt abstraites, ressemblant parfois à des géographies, des photos aériennes de campagnes agricoles, Marie aimant à se perdre dans des jardins austèrement ratissés à la Ryoân-Ji , tantôt elles sont figuratives, campant des grosses têtes sommaires sans détail superflu, ou bien tantôt encore ses œuvres combinent un peu les deux séries, ce que personnellement je préfère chez elle. Ce sont du reste ces dernières œuvres qui pourraient la faire ranger dans l'art brut, en raison de leur tension inventive, tandis que les autres, les grosses têtes, la feraient plutôt ranger du côté des Singuliers, autodidactes sans formation artistique créant des figurations sans volume, dans un graphisme proche de l'art enfantin ou du moins d'une certaine stylisation, mais non dénuées de références à la culture artistique (à commencer par d'autres singuliers, comme Chaissac, Sanfourche, Macréau, Basquiat, Chomo...). Avec ses "grosses têtes", elle entretient un cousinage inconscient avec un Pierre Albasser, lui aussi révélé au musée de la Création Franche du reste. L'œuvre piquetée, sur un fond préalablement aquarellé, elle ajoute parfois aussi du fil et rajoute de la broderie dans ses compositions (les plus complexes). Et puis elle passe beaucoup de temps à les cadrer grâce aux passe-partout qui jouent un rôle primordial dans ses œuvres.
Marie Audin dans ses efforts de cadrage, ph. BM, 2014
Marie Audin, sans titre, deux figures en broderie et pricking, ph BM, 2010
C'est donc à une seconde peau que s'en prend Marie Audin, avec ses aiguilles, et le vocabulaire dermique peut facilement venir à l'aide en ce qui la concerne. C'est une curieuse acupuncture en effet à laquelle elle se livre, sur le corps symbolique de l'image, et parfois aussi de curieuses sutures avec sa broderie. A qui prodigue-t-elle en premier ce qui s'apparente à des soins avec ses seringues et ses aiguilles? Quelles plaies recoud-elle? S'agit-il des spectateurs, ou d'elle-même? Probablement des deux.
La boule aux aiguilles variées, qui sont les outils de la créatrice ; à noter aussi dessous le set de table avec ses sillons concentriques qui ressemblent à certaines des compositions de Marie Audin, ph BM, 2014
00:42 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marie audin, création franche, art brut, art immédiat, art singulier, acupuncture, sutures, dermatologie, peaux, pores, aiguilles, seringues, pointillisme, pricking | Imprimer
04/10/2014
Création franche et productive
J'ai gardé silence cet été sur deux publications du musée de la Création Franche à Bègles me disant que cela serait plus judicieux d'en parler à présent que plusieurs internautes sont revenus de leurs campagnes, d'après ce que j'en juge en parcourant les statistiques de ce blog. En effet elles sont sorties en plein juillet, pendant que vous vous détachiez, chers internautes, de toutes tablettes, et autres engins électroniques, voir presse et radios traditionnels. Le musée n'en a cure, sa communication ne lui paraît pas essentielle, peut-être se dit-il "Dieu reconnaîtra les siens". La distribution de ses libelles et autres catalogues se fait centralement à Bègles dans ses locaux. Vous ne la trouverez que par la grâce d'un miracle en librairie. Même la Halle St-Pierre à Montmartre ne la diffuse qu'erratiquement. Et pourtant... Voici qu'est paru le n°40 de leur revue (lui pourtant disponible à la librairie de la Halle), avec une couverture noire minimaliste et pourtant baroque, une photo avec des superpositions qui fait penser à un archipel ou un oiseau dans les ténèbres, due à l'art raffiné de la photographe Marie-France Lacarce. Belle couverture qui veut peut-être solenniser ce chiffre rond - 40 numéros tout de même - mais qui sera la seule façon de marquer le coup pour ce bel effort éditorial, car nulle fête ne se profile à l'horizon pour ce quarantième non rugissant, mais séduisant.
Charles Cako Boussion, panneau de signalisation bricolé, retrouvé par Charles "Cako" Boussion et profondément modifié par la peinture et des ajouts d'inscriptions en "profession de foi", 36x63 cm, 1983, coll. BM, Paris
Il y est question de Cako Boussion - c'est moi qui me charge d'un article qui veut montrer que monsieur Boussion ne se cantonne pas aux compositions en mandalas, dites parfois "médiumniques", mais peut se révéler parfois bien plus éclectique dans ses choix de formes d'expression (comme on s'en convaincra ci-dessus). Paul Duchein rappelle de son côté l'environnement qu'avait créé Abdelkader Rifi à Gagny, en voisin de Madeleine Lommel l'ancienne fondatrice de l'Aracine. Il signe un second article sur les intéressantes compositions en coquillages de François Aloujes. Bernard Chevassu met pour sa part le focus sur un autre créateur d'environnement, Roger Mercier, qui vient d'abandonner son "Château de Bresse et Castille" située en pleine Bresse, site architectural naïf que nous avait autrefois révélé Frédéric Allamel dans Plein Chant (voir petit cliché ci-contre, ph. Bruno Montpied). Joe Ryczko quant à lui refait parler de l'excellent Alain Genty et de ses terres vernissées hautement "agitées", citant au passage le travail d'information que fait Thierry Bucquoy sur son blog à propos de Genty.
Dimitri Pietquin, illustration extraite du catalogue de "Visions et Créations Dissidentes" 2014
Il est à noter qu'il y a ce me semble une sorte d'écart qui grandit entre les créateurs et artistes évoqués dans la revue Création Franche et ceux que le Musée présente en ce moment dans sa dernière édition de "Visions et Créations dissidentes" (du 27 septembre au 23 novembre). Ai-je la berlue, ou bien ai-je raison de trouver qu'il y a vraiment de plus en plus de créateurs venus d'ateliers pour handicapés mentaux dans les expositions d'automne du musée (on sait que les autres expositions le reste de l'année sont plus spécifiquement consacrées à la découverte et la mise à jour des créateurs du fonds permanent du musée)? Dans la dernière mouture de cette exposition automnale, montrant comme d'habitude 8 nouveaux créateurs, il semble qu'on y compte au moins 5 ou 6 travaux d'ateliers, dont deux proviennent d'ESAT (Aide par le Travail). Ces ESAT qui paraissent bien rares - selon moi n'est-ce pas? - en travaux véritablement originaux (à l'exception notable comme je l'ai déjà plusieurs fois écrit sur ce blog, de l'ESAT de Ménilmontant, avec son Philippe Lefresne et son Fathi Oulad Ben Abid). Parmi ces travaux d'atelier, bien sûr il arrive que surgisse une œuvre plus attirante qu'une autre, mais les ressemblances avec d'autres travaux de talent déjà vus ne sont pas absentes, ainsi pour cette édition béglaise 2014 des œuvres de Dimitri¨Pietquin reproduites dans le catalogue. Au milieu de ces créateurs, surnage aussi (je me base on l'aura compris uniquement sur le catalogue pour exprimer cet avis), apparemment un peu incongrue par l'aspect savant de ses reliquaires en assemblages d'objets recyclés et amalgamés en un ordre esthétique déjà rencontré dans les galeries parisiennes de la Rive Gauche, Lucie de Syracuse, dont Gérard Sendrey avait déjà parlé dans un numéro précédent de la revue Création Franche (d'une façon un peu absconse, je dois dire...).
Lucie de Syracuse, illustration extraite du catalogue "Visions et Créations Dissidentes" 2014
Au cœur du mois de juillet enfin, est paru avec retard un grand numéro hors-série (n°1) de Création Franche consacré entièrement aux "fanzines d'art brut et autres prospectus" et qui se veut "Actes de la Rencontre du 23 novembre 2013". En réalité, ce numéro est composé de textes et autres réponses à un questionnaire qui avaient été rédigées bien en amont de cette journée de novembre.
Le but recherché par le musée et par deux protagonistes du CRaB, Déborah Couette et Céline Delavaux, était, en interrogeant les protagonistes des revues et autres bulletins tournant autour de "l'art brut" (les Caire, moi, Bruno Montpied, Danielle Jacqui, Joe Ryczko, Gérard Sendrey, Jean-François Maurice, décédé peu de temps avant la journée du 23 novembre, Martine Lamy, et Denis Lavaud) et en exposant divers documents, de proposer à l'attention de (futurs?) chercheurs quelques exemples de publications plus ou moins amateurs qui des années 80 à aujourd'hui faisaient de l'information sur des domaines de la création populaire marginale. Il est à remarquer cependant que les revuettes et autres fanzines évoqués n'étaient pas à proprement parler des fanzines d'art brut (même si Céline Delavaux dans sa contribution à ce numéro Hors-Série contourne le problème en parlant de "manières d'édition brutes"...). Si l'on s'en tient aux définitions du concept inventé par Dubuffet, la seule revue d'art brut qui ait véritablement existé des années 60 jusqu'à aujourd'hui est ce que l'on appelle improprement "les Cahiers de l'Art Brut" et qu'il faut plutôt appeler les Fascicules de la Collection de l'Art Brut, émanant comme le dit le titre de la fameuse Collection installée à Lausanne depuis les années 70. En réalité les revuettes évoquées dans ce numéro lié à la rencontre de Bègles évoquent toutes sortes de formes de création, de l'art brut strict, jusqu'à l'art contemporain insolite, en passant par des artistes singuliers historiques, les environnements spontanés (pas tous réductibles à l'art brut), l'art des handicapés, les graffiti, le surréalisme conscient ou inconscient, l'art visionnaire, les fous littéraires, l'excentricité en littérature, l''art naïf, etc, etc. Comme s'il n'était pas possible de monter une publication qui se circonscrirait uniquement à l'art brut. Ce constat, très peu dans ces "actes" ne le mentionnent et pourtant, il aurait mérité d'être mentionné et peut-être débattu.
A signaler enfin que malgré une promesse entendue pendant la journée du 23 novembre le numéro hors-série en question n'est pas parvenu à nous restituer sous une forme écrite (pourtant il y eut captation par la vidéo et le son) les échanges qui eurent lieu durant cette journée, notamment la table ronde finale entre Jean-Claude Caire, Bruno Montpied, Gérard Sendrey, Pascal Rigeade et Denis Lavaud. Peut-être aurons-nous cette restitution plus tard notamment sous une forme vidéo mise en ligne sur le site du Musée de la Création Franche?
On l'aura donc compris, c'est auprès de ce dernier qu'il faut se rendre pour se procurer ces diverses publications récentes.
19:31 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art populaire contemporain, Art populaire insolite, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : création franche, musée de la création franche, halle saint-pierre, marie-france lacarde, n°40 de la revue création franche, les fanzines de l'art brut, crab, céline delavaux, déborah couette, bruno montpied, pascal rigeade, gérard sendrey, cako boussion, paul duchein, françois aloujes, joe ryczko, jean-françois maurice, abdelkader rifi, alain genty, thierry bucquoy, roger mercier, environnements spontanés, esat, art des handicapés mentaux | Imprimer
24/09/2014
Deux petits événements à retenir pour les "Happy few"
Cette semaine, j'ai oublié de les mentionner, il y a deux rendez-vous.
Le premier, c'est sur Radio-Libertaire demain matin (jeudi 25 septembre) de 10h30 à midi dans l'émission Chroniques Hebdo animée par Gérard Jan. Je suis invité à causer de ma participation à l'exposition actuelle de la Halle Saint-Pierre "Sous le vent de l'art brut 2, la collection De Stadshof", de l'animation du présent blog et aussi de mon article paru sur les bouteilles malicieuses du couple Beynet dans le n°3 de la revue L'Or aux 13 îles.
Bouteille de Louis et Céline Beynet, des filles et des monstres, coll. BM
Et le deuxième événement, quel art de la transition, n'est-ce pas?, c'est justement la présentation de la revue L'Or aux 13 îles de Jean-Christophe Belotti à la librairie du Sandre, rue du Marché Ordener dans le 18e ardt de Paris vendredi soir. Tous les amateurs de cette splendide revue sont cordialement invités à venir boire un coup et discuter avec les collaborateurs de cette revue. Voir le fichier PDF en lien ICI.
10:43 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art populaire contemporain, Art populaire insolite, Art singulier, Environnements populaires spontanés, L'oeil du Sciapode, Paris populaire ou insolite, Poésie naturelle ou de hasard, paréidolies, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : chroniques hebdo, radio libertaire, bruno montpied, le poignard subtil, sous le vent de l'art brut 2, halle st-pierre, l'or aux 13 îles, jean-christophe belotti, beynet, librairie du sandre | Imprimer